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Page:Louant - Pauvre Germaine !, 1888.djvu/9

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livre et s’assied près de moi, je suis heureuse de causer avec lui.

J’ai tant de choses à lui dire, et depuis que je suis la maîtresse absolue, je suis timide et hésitante ; je remets de jour en jour les entretiens sérieux. Puis, nous ne sommes jamais seuls, je voudrais que Jacques me reparlât le premier de notre mariage ; mois gagnés tous deux par le charme poétique des choses qui nous entourent, nous restons silencieux.

Devant nous, par une éclaircie des arbres du jardin, nous voyons la plaine où commence la fenaison, nous entendons la chanson des faneuses qu’accompagne le clapotis, que fait sur les cailloux l’eau d’un ruisseau voisin.

C’est étonnant combien les choses les plus simples sont parfois difficiles à exécuter ; Jacques ne m’aide pas et je ne trouve pas les mots qui devraient traduire ma pensée :

— Jacques, murmurai-je enfin…

Il s’est penché vers moi. Mais alors Jeanne s’est levée et jetant sur l’herbe, son album et ses crayons, elle est venue à nous :

— C’est assez de sagesse pour aujourd’hui, s’est-elle écriée.

— Tu crains de tout dépenser en une fois, a dit Jacques en riant.

— Viens, Germaine, je vais te faire un grand plaisir, j’ai trouvé un nouveau nid de fauvettes.

Et il a fallu aller voir sa trouvaille.

Dans un creux que formait, contre le mur, une souche du vieux lierre, repliée sur elle-même, selon le caprice de celui qui l’avait dirigée quand elle était jeune et souple, nous vîmes un tout petit nid de fauvettes grises, fait d’herbe sèche et tapissé, à l’intérieur, de plumes, de filaments, de débris, recueillis partout ; les plus doux qu’avaient pu trouver les intelligents petits êtres qui devaient y loger leur intéressant ménage ; quatre créatures informes, à peine emplumées, y étaient entassées les unes sur les autres ; quatre becs largement fendus et ourlés de jaune clair s’ouvraient tous ensemble en criant, quand le père ou la mère arrivait et distribuait impartialement le contenu d’un très long bec tout garni d’insectes : mouches, moucherons, cousins et papillons dont les ailes palpitaient des deux côtés ; puis les becs se refermaient, attendant une nouvelle aubaine.

Nous nous éloignâmes pour laisser en paix l’heureuse famille. Jeanne reprit ses crayons et me retint près d’elle — pour te demander conseil, me dit-elle.


30 Août. — J’aime la simplicité de notre vie ; ma maison est même un peu sévère, nous recevons peu, car ma mère n’aimait ni le monde ni les réceptions, elle m’a formée à ses goûts.