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Page:Louis-d-elmont-l-inceste royal-1925.djvu/53

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La princesse et son amant n’avaient pas quitté leur chambre. Ils y étaient restés enfermés tout le jour, ne se rassasiant pas de s’aimer. Et ils n’avaient nullement envie de quitter ce logis modeste, mais théâtre de leurs exploits passionnés, quand le soir revint.

Or, à la tombée de la nuit, la nourrice d’Arnaud frappa à l’huis de la chambre des amoureux.

D’une voix toute tremblante, elle cria à travers la porte :

— Arnaud ! Arnaud !… Lève-toi vite !… Il y a en bas un officier à cheval qui te demande au nom du roi…

— Ciel ! s’écria le jeune homme… Nous sommes déjà découverts… Que ne lui as-tu caché notre présence ?

— Je ne le pouvais pas. Mais il ne vous veut pas de mal. Venez tous les deux, je vous en prie…

— Il faut y aller, dit Séraphine. Si cet officier est seul, il ne pourra nous contraindre à le suivre.

— Il est seul, sans escorte, j’en réponds, dit la nourrice.

— Soit ! répondit Arnaud, je descends le premier, pendant que la princesse s’habille pour me venir rejoindre.

Quelques instants plus tard, le jeune lieutenant se trouvait en face d’Adhémar de Chamoisy. Il ne fut pas peu surpris de voir que le chef des hallebardiers de la garde était venu seul le trouver. Cependant, il ne prit pas une attitude humiliée. Ce fut au contraire, en regardant fixement dans les yeux son supérieur, qu’il lui déclara :

— Messire mon colonel, j’ignore de quelle mission vous a chargé le roi, mais sachez bien que je suis disposé à lui désobéir, s’il veut me séparer de celle que j’aime, et que je m’opposerai avec tout mon courage à ce qu’on la reconduise dans le couvent d’où je l’ai tirée. Quand même toute une armée serait envoyée contre moi, je lutterais seul contre elle jusqu’à la mort pour défendre la princesse.

Et Arnaud, joignant le geste à la parole, faisait déjà mine de tirer son épée.

— Tout beau, répondit Adhémar, « j’admire votre belle impétuosité… Mais je ne suis pas venu pour écouter des mots de défi, je suis venu pour faire part à la princesse Séraphine les ordres de Sa Majesté.

— Vous plairait-il de me dire quels sont ces ordres ?

— Non, j’ai pour mission de ne les communiquer qu’à la princesse elle-même et j’attendrai qu’elle veuille bien paraître devant moi.

Le colonel des hallebardiers n’eut pas longtemps à attendre, car Séraphine apparaissait au même moment.

Adhémar s’inclina profondément devant elle, comme s’il eût été à la cour de Sigourie.

— Noble dame, dit-il, notre auguste souverain m’a chargé de vous communiquer ses intentions à votre égard…