Page:Louis Antoine de Bougainville - Voyage de Bougainville autour du monde (années 1766, 1767, 1768 et 1769), raconté par lui-même, 1889.djvu/219

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nous avons observé dans le cours de ce voyage, qu’en général, les hommes nègres sont beaucoup plus méchants que ceux dont la couleur approche de la blanche. Ceux-ci sont nus, à l’exception d’une bande de natte qui leur sert de ceinture. Leurs boucliers sont d’une forme ovale, faits de joncs tournés les uns au-dessus des autres et parfaitement bien liés. Ils doivent être impénétrables aux flèches. Nous avons nommé la rivière et l’anse d’où sont sortis les braves insulaires, la rivière des Guerriers ; l’île entière et la baie, île et baie Choiseul. La presqu’île du nord est toute couverte de cocotiers. Il venta peu les deux jours suivants. Après être sortis du passage, nous découvrîmes dans l’ouest une côte longue et montueuse, dont les sommets se perdaient dans les nues. Le 2 au soir, nous voyions encore les terres de l’île Choiseul. Le 3 au matin, nous ne voyions plus que la nouvelle côte, qui est d’une hauteur surprenante, et qui court au nord-ouest-quart-ouest. Sa partie septentrionale nous parut alors terminée par une pointe qui s’abaisse insensiblement et forme un cap remarquable. Je lui ai donné le nom de cap l’Averdi. Il nous restait, le 3 à midi, environ à douze lieues dans l’ouest cinq degrés nord du compas, et la hauteur méridienne que nous observâmes nous donna le moyen de déterminer avec justesse sa position en latitude. Les nuages qui couvraient les sommets des terres se dissipèrent au coucher du soleil, et nous laissèrent apercevoir des cimes de montagnes d’une hauteur prodigieuse. Le 4, les premiers rayons du jour nous firent voir des terres plus occidentales que le cap l’Averdi. C’était une nouvelle côte moins élevée que l’autre, et courant au nord-nord-ouest. Entre la pointe du sud-sud-est de cette terre et le cap l’Averdi, il restait un vaste espace formant ou un passage, ou un golfe considérable. Dans un grand éloignement on y apercevait quelques mondrains. Derrière cette nouvelle côte nous en aperçûmes une plus haute, qui suivait le même gisement. Nous tînmes le plus près toute la matinée, pour accorder la terre basse. Nous en étions à midi environ à cinq lieues de distance, et nous relevâmes sa pointe du nord-nord-ouest au sud-ouest-quart-ouest. L’après-midi trois pirogues, dans chacune desquelles étaient cinq à six nègres,