Page:Louis Delaporte - Voyage d'exploration en Indo-Chine, tome 1.djvu/284

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
249
VOYAGE D’OUBÔN À KEMARAT.

captives. Le roi se rhabilla et vint présider un banquet auquel étaient conviés les membres de la Commission française. Le soir, les réjouissances ordinaires, feu d’artifice, tours de force, furent servis à la foule, et le calme de la nuit fut longtemps troublé par les chants et les concerts d’instruments.

Les membres de la Commission admirèrent à Oubôn une vieille cage d’éléphant en bois sculpté, qui était conservée dans une pagode ; elle était faite pour le combat, et les hommes armés qui y prenaient place s’y trouvaient abrités par deux grands boucliers en bois dur. La cage était fermée en arrière par un écran en bois, orné de fleurs, d’oiseaux et d’arabesques, sculptés avec un art infini et incrustés de pierres brillantes et de lames de verre[1].


DRAGON CREUSÉ, SERVANT DE RÉSERVOIR D’EAU CONSACRÉE.

M. Delaporte partit le 15 janvier pour redescendre le Se Moun et reconnaître le cours du grand fleuve entre Pak Moun et Kémarat ; le reste de la Commission devait prendre la route de terre pour se rendre à ce dernier point[2]. Elle partit d’Oubôn le 20 janvier avec six éléphants, quinze chars à buffles, et une cinquantaine de Laotiens. Au nord d’Oubôn, le pays est plat et couvert de rizières et de clairières alternées. De larges routes de chars se croisent dans tous les sens sur un terrain sablonneux où elles n’ont été frayées que par le passage même des véhicules. La longue caravane de la Commission française cheminait fort lentement ; elle mit quatre jours pour arriver à Muong Amnat, situé à une cinquantaine de kilomètres dans le N.-N.-O. d’Oubôn. Là, cessaient les routes de chars.

Il fallut adjoindre neuf éléphants à ceux dont disposait déjà la Commission et recruter dans le village cent nouveaux porteurs pour remplacer ceux qui l’avaient accompagnée jusque-là. On fit à ces derniers une distribution de fil de laiton qui parut leur causer un plaisir d’autant plus vif que ce cadeau était plus inattendu. Les mandarins, chargés par le roi d’Oubôn de pourvoir en route aux besoins de la Commission française, semblèrent regretter vivement que cette rémunération, si en dehors des habitudes des grands personnages indigènes, fût répartie immédiatement et individuellement. Ils y perdaient la part du lion qu’ils se seraient sans doute réservée, si la distribution de ces largesses eût été commise à leurs soins.

  1. Voy. le dessin de cette cage ou selle d’éléphant, Atlas. 2e partie, pl. XVIII.
  2. Consulter, pour la suite du récit, la carte itinéraire n°4, Atlas, 1re partie, pl. VII.