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En continuant la route de terre jusqu’à Siemréap, on passe à peu de distance d’une haute tour en ruines qui domine encore la plaine. C’est le sanctuaire d’Athvéa. La citadelle de Siemréap, construite il y a une quarantaine d’années, s’offre ensuite aux regards. Tous les matériaux dont ses murs sont formés, ont été tirés des ruines voisines auxquelles on devient de plus en plus impatient d’arriver. Le chemin sablonneux qui passe devant cette forteresse s’enfonce bientôt, toujours dans la direction du nord, sous une jeune et belle forêt, bien différente de la forêt marécageuse des bords du lac. Après un trajet de trois kilomètres environ, on arrive à la terrasse qui précède Angcor Wat[1] ou « la pagode d’Angcor », le monument le plus important et le mieux conservé de toutes les ruines.

Ce fut ce dernier édifice que choisit la Commission, comme centre de ses travaux et comme lieu d’habitation et de ralliement pendant ses excursions aux ruines voisines. Elle s’installa dans les cases en bambous construites au pied de la façade principale, et destinées au logement des pieux pèlerins qui viennent visiter cet antique sanctuaire.

Une chaussée en pierre, à moitié enfouie sous le sol de la forêt, relie Angcor Wat à la porte sud de l’antique ville d’Angcor thom ou « Angcor la Grande », située à trois kilomètres, dans la direction du nord. Sur la gauche de cette chaussée s’élève le mont Bakheng, dont le sommet était couronné autrefois de constructions considérables. L’enceinte d’Angcor Thom, les monuments disséminés au dedans et au dehors de la ville dans un assez faible rayon, constituent la partie la plus considérable de tout ce magnifique groupe de ruines, dont il serait difficile peut-être de retrouver ailleurs l’analogue.

Enfin, une autre chaussée qui part de la porte est d’Angcor Thom pour se diriger vers le fleuve, conduit également à un grand nombre d’autres édifices échelonnés dans cette direction.

Ce dernier trajet avait été accompli par le commandant de Lagrée en mars 1866.

Nous allons suivre l’ordre de cet itinéraire pour faire connaître les différents monuments compris dans ce faible espace.

Mais, avant d’entrer dans la description détaillée de chacun d’eux, il est nécessaire, pour éviter les répétitions, d’exposer les lois générales qui semblent avoir présidé à leur construction. Nous allons donc indiquer d’abord les matériaux employés et leur appareillage, le mode de construction des murs et des voûtes, les procédés décoratifs particuliers à cette architecture, et nous chercherons à arriver ainsi à une classification générale de tous les monuments que nous avons à décrire. Il ne restera plus ensuite qu’à rapporter chacun d’eux à la catégorie qui lui convient et à noter les particularités qui le distinguent. Sa description y gagnera en brièveté et en clarté.

Matériaux. — Les matériaux employés dans la construction des édifices khmers sont :

1o une pierre formée de concrétions ferrugineuses, connue en Cochinchine sous le nom

  1. Il serait plus correct d’écrire Vaht. Le v en cambodgien se prononce comme le w anglais.