Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/185

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’État, le sénat hésitait à punir les malversations, dans la crainte d’indisposer cette classe déjà puissante[1]. La richesse territoriale était en partie dans la main des grands propriétaires ; cela ressort de plusieurs faits et, entre autres, de l’hospitalité donnée par une dame de l’Apulie à 10 000 soldats romains, débris de la bataille de Cannes, qu’elle entretint à ses frais sur ses terres[2].

Le respect pour les hautes classes avait reçu quelques atteintes, comme on peut s’en convaincre par l’adoption d’une mesure peu importante en apparence. Depuis la chute de la royauté, on n’avait établi, dans les jeux publics, aucune distinction entre les spectateurs. La déférence pour l’autorité rendait toute classification superflue, et « jamais un plébéien, dit Valère Maxime[3], n’aurait osé se placer devant un sénateur. » Mais, vers 560, une loi intervint pour assigner aux membres du sénat des places réservées. Il est nécessaire, pour le bon ordre d’une société, de rendre les lois plus sévères à mesure que le sentiment de la hiérarchie sociale s’affaiblit.

Les circonstances avaient amené d’autres changements. Le tribunat, sans être aboli, était devenu un auxiliaire de l’aristocratie. Les tribuns ne représentaient plus exclusivement l’ordre des plébéiens ; ils avaient leur entrée au sénat, faisaient partie du gouvernement et employaient leur autorité dans l’intérêt de la justice et de la patrie[4]. Les trois espèces de comices existaient toujours[5], mais quelques modifications y avaient été introduites. L’assemblée des

  1. Tite-Live, XXI, lxiii ; XXV, iii.
  2. Valère Maxime, IV, viii, 2.
  3. Valère Maxime, IV, v, 1.
  4. Ils n’avaient pas de voix délibérative, parce que, d’après le droit public romain, aucun magistrat en fonctions ne pouvait voter. (Voyez Mommsen, I, 187.)
  5. « Maintenant vous avez encore les comices par centuries et les comices par tribus. Quant aux comices par curies, ils ne sont notés que pour les auspices. » (Cicéron, IIe discours sur la loi agraire, ix.)