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Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/285

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jamais ni sa chaussure ni sa ceinture, pour éviter tout soupçon de vouloir s’échapper à la nage[1]. Il semblait moins un captif, dit Plutarque, qu’un prince entouré des ses gardes ; tantôt jouant avec eux, tantôt leur récitant des poëmes, il s’en faisait aimer et craindre, et leur disait en riant qu’une fois libre il les ferait mettre en croix[2]. Cependant le souvenir de Rome revenait à son esprit et lui rappelait les luttes et les inimitiés qu’il y avait laissées. Souvent on l’entendait dire : « Quel plaisir aura Crassus de me savoir en cet état[3] ! »

Dès qu’il eut reçu de Milet et d’autres villes sa rançon, il la paya. Débarqué sur la côte, il s’empressa d’équiper des navires, impatient de se venger. Les pirates, surpris à l’ancre dans la rade de l’île, furent presque tous faits prisonniers, et leur butin tomba entre ses mains. Il les remit en dépôt dans la prison de Pergame, pour les livrer à Junius Silanus, proconsul d’Asie, auquel il appartenait de les punir. Mais, voulant les vendre pour en tirer profit, Junius répondit d’une manière évasive. César retourna à Pergame et les fit mettre en croix[4].

Il alla ensuite à Rhodes suivre les leçons d’Apollonius Molon, le plus illustre des maîtres d’éloquence de cette époque, qui déjà était venu à Rome, en 672, comme ambassadeur des Rhodiens. Vers le même temps, le proconsul M. Aurelius Cotta, un de ses oncles, avait été nommé gouverneur de la Bithynie, léguée par Nicomède au peuple romain, et chargé avec Lucullus de s’opposer aux nouveaux envahissements de Mithridate. Cotta, battu sur terre et sur

  1. Velleius Paterculus, II, xli.
  2. Plutarque, César, ii.
  3. Plutarque, Crassus, viii.
  4. Suétone signale comme un acte d’humanité que leurs cadavres seuls aient été mis en croix, César les ayant fait étrangler auparavant pour abréger leur agonie. (Suétone, César, lxxiv. — Velleius Paterculus, II, xlii.)