Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/62

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Vous me dites : Quel mal y a-t-il à cela ? et je réponds : Aucun, mes frères ; ces jeunes gens ont travaillé, marché, couru, parlé, discuté, ils ont bon appétit, ils ont faim et ils ont soif, il est tout naturel qu’ils veuillent se restaurer et je pense comme vous.

Cependant, ce saucisson et ce gâteau, le mange-t-on en ville ? ce litre de vin, le boit-on sur une table de restaurant ? Non, mes frères, et j’appelle ici toute votre attention.

Ce petit repas ne se consomme qu’au retour, le long du bois, au bord du Doubs.

— C’est charmant, vous exclamez-vous ! Il est certes beaucoup plus agréable de manger sur l’herbe qu’enfermé dans une salle malpropre et au milieu d’une atmosphère viciée.

Encore ici, vous avez raison.

Mais, je continue. On s’en vient donc deux à deux et quand on a trouvé dans un petit coin, au bord du bois, un endroit paisible et solitaire, on déballe les provisions et l’on s’assied.

Proprement, pour ne pas la salir, la fille relève sa jupe, et, sur son jupon, sur son jupon tendu, mes frères, tendu comme une nappe, comme une nappe, vous m’entendez bien, mes sœurs, on étale victuailles, pain, vin et gâteaux, et l’on mange.

— Mais c’est parfait.

— C’est parfait, n’est-ce pas ; oui… c’est parfait, mais, sapristi, continua-t-il alors s’excitant,