Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/95

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lers d’arrondissement et municipaux qui leur avaient valu d’innombrables jours de liesse et des quantités incalculables de verres.

Seuls, les Sénateurs n’avaient pas leur sympathie. C’étaient de vieux fainéants, et voilà tout !

Ah ! oui, qu’ils le bénissaient le suffrage universel et il n’aurait pas fallu qu’un jeanfoutre d’un pays voisin vînt contester leur droit « sacré et imprescriptible », qu’ils lui auraient bien fait voir de quel bois on se chauffait à Longeverne, si toutefois les lois de l’équilibre, constamment compromises chez ces sympathiques citoyens, leur eussent permis une démonstration aussi énergique.

Il y avait bien eu, parfois, mon Dieu, des anicroches. Ainsi, un printemps, Abel saoulé huit jours durant et maintenu reclus dans cet état chez sa bonne femme de tante dévouée au parti blanc, avait été mené à l’urne par un « pur », son billet à la main, tellement et si bien que les Rouges lui en avaient fait la tête jusqu’aux élections suivantes, où ils s’étaient d’ailleurs juré de profiter de l’exemple et d’agir de même. Une autre fois, Laugu, trop ivre, n’avait pu aller jusqu’à la salle de vote et les deux partis lui en avaient voulu à tel point que c’en avait été un désastre pendant deux ou trois ans. Mais ces petites leçons leur avaient servi, et comme des guerriers qui supportent toutes les épreuves tant qu’ils n’ont pas