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LA PHARSALE.

Notre main, Métellus, ne peut se souiller de ton sang. Tu n’es pas assez grand pour mériter la colère de César. La liberté n’aurait-elle plus que toi pour défenseur ? Cependant le temps n’a pas tellement bouleversé les choses, que les lois aiment mieux s’appuyer sur Métellus, que fléchir devant César. »

Il dit ; mais le tribun ne quitte pas le seuil. César s’irrite plus encore, et promène ses regards sur les épées nues, oubliant qu’il s’est caché sous la toge pacifique. Alors Colta vient prier Métellus de renoncer à cette téméraire entreprise : — « La liberté sous un maître périt par la liberté même ; pour en conserver l’image, apprends à vouloir ce qu’on t’ordonne : vaincus, nous avons obéi à tant de violences : tremblants, dégénérés, notre honte n’a qu’une excuse ; nous ne pouvons rien refuser au vainqueur. Qu’il se hâte d’emporter ces trésors, fatales semences de guerre. Ces pertes peuvent affliger un peuple libre ; la misère de l’esclave n’est lourde » qu’a son maître. » Aussitôt on entraîne Métellus, le temple s’ouvre, et la roche Tarpéienne résonne ; un grand bruit annonce que les portes ont roulé sur leurs gonds.

Des profondeurs du sanctuaire on arrache le dépôt longtemps inviolable des deniers romains, cet or, trophée de Carthage, dépouille conquise sur Persée et sur Philippe ; cet or, que Pyrrhus t’abandonna dans sa fuite tremblante, Rome, et que Fabricius refusa d’un roi qui voulait l’acheter ; les (épargnes de l’antique frugalité, et les tributs de l’opulente Asie, et les richesses que Métellus vainqueur ravit à l’île de Minos, et celles que des rives lointaines de Chypre apportèrent les vaisseaux de Caton ; et tout le butin de l’Orient, trésors des derniers rois, étalés naguère devant les triomphes de Pompée ; tout est en proie. Le temple reste vide après ce triste pillage : enfin Rome est plus pauvre que César(3) !

Cependant la fortune de Pompée attirait tous les peuples du monde dans sa cause et dans sa ruine. La Grèce donne des soldats pour la guerre dont elle doit être le théâtre. Amphise envoie ses Phocéens ; les rochers de Cyrrha et les deux cimes du Parnasse n’ont plus d’habitants. Les peuples descendent des campagnes de la Béotie, qu’arrosent les flots rapides du Céphise fatidique ; il vient des troupes de Pise, et de la Thébaine Dircé, et de l’Alphée qui porte ses eaux par-dessous les mers aux peuples de Sicile. Ceux d’Arcadie quittent le Ménale ; ceux de Thessalie l’Œta, où repose Hercule. Le Thesprote accourt avec le Dryope : les Selles abandonnent la Chaonie et ses vieux chênes qui ne rendent plus d’oracles. Quoique veuve de toute sa jeunesse, Athènes arme quelques faibles poupes dans le port de Phébus,

Vocibus accensus : « Vanam spem mortis honestæ
Concipis : haud, inquit, jugulo se polluet isto
Nostra, Metelle, manus. Dignum te Cæsaris ira
Nullus honor faciet. Te vindice tuta relicta est
Libertas ? non usque adeo permiscuit imis
Longus summa dies, ut non, si voce Metelli
Serventur leges, malint s Cæsarc tolli. »

Dixerat ; ct nondum foribus cedente tribuno
Acrior ira subit ; sævos cireumspicit enses,
Oblitus simulare {ogan : tam Cotta Metellum
Compulit audaci nimium desistere cœpto.
« Libertas, inquit, populi quem regna cocreent,
Libertate perit ; cujus servaveris umbram,
Si, qnidquid jubeare, velis. Tot rebus iniquis
Paruimus victi : venia est bæc sola pudoris,
Degenerisque metus, nil jam potuisse negari.
Oaivs axertant diri mala semina Lelli.
Damna movent populos, si quos sua jura tuentur.
Non sibi, sed domino gravis est, quæ servit, egestas. »

Protinus abducto patuerunt templa Metcllo
Tunc rupes Tarpeia souat, msgnoque reclucas
Testatur stridore fores : tuue conditus imo
Eruitur templo, multis intactus ab annis
Romani census populi, quem punica bella,
Quem dederat Perses, quem victi præda Philippi ;
Quod tibi, Roma, fuga Pyrrhus trepidante relujuit :
Quo te Fabricius regi non vendidit aurs ;
Quidquid parcorum mores servastis avorum :
Quod dites Asiæ populi misere tribntum ;
Victorique dedit Minoia Greta Metello ;
Quod Cato longinqua vexit super æquora Cypro.
Tunc Urientis opes, captorumque ultima rejyunt
Quæ Pompeianis prælata est gaza triumphis
Egeritur : tristi spoliantur templa rapina ;
Pauperiorque fuit tunc primum Cæsare Roma.
Interca totum Magni fortuna per arbem

Secum easuras in prelia moverat urbes.
Proxima vicino dat vires Græcia bello.
Phocaicas Amyhissa manus, scopulosaque Cyrrha,
Parnassusque jugo misit desertus utroque.
Bœoti coiere duces, quos impiger ambit
Fatidica Cephissos aqua, Cadmeaque Diree,
Pisææque manus, populisque per æquora mitens
Sicaniis Alphous aquas. Tunc Mænala liquit
Arcas, et Herculeam aniles Trachinius Œten.
Thesproti, Drvopesque ruunt, quereusqne silenter
Chaonio veteres liquerunt vertice Sellæ.
Exhaucit totas quamvis delectus Athenas,