Page:Luchet, etc. - Fontainebleau, 1855.djvu/231

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murmurer dans leurs petits craquements : « Comme vous nous avons vécu, aimé, souffert ! Nous étions heureuses quand, suspendues aux branches de nos bien-aimés, nous poussions dans les airs nos soupirs de tendresse et de joie ! — quand le soleil de mai répandait sur nous ses plus chaudes caresses ! — quand le zéphyr parfumé du printemps nous balançait entre la terre et le ciel ! zéphyr, trop tôt par la bise d’octobre. Depuis la venue de ce vent cruel, pauvres feuilles errantes, nous volons de désert en désert, pleurant et appelant en vain notre amour perdu !

L’amour, c’est la vie. Voyez dans les tiédeurs fécondantes du printemps, sous les bouffées d’air et de soleil, comme tout s’anime et respire à l’aise ! L’homme n’a pas assez de poumons pour aspirer ; la fleur ouvre son calice et livre au souffle amoureux de la brise les trésors et les parfums qu’enfermait sa corolle ; les grillons murmurent ; les oiseaux sifflotent leurs plus joyeuses chansons. La forêt alors nous apparaît comme l’Éden perdu de notre premier père ; le malade y va chercher la santé, le pauvre l’air pur, loin de la ville, où, souvent corrompu, l’air se mesure et se paye ; les arbres et les fleurs font même accueil au moins riche comme au plus fortuné. C’est là que l’amant vient cacher son bonheur, et sent doubler son ivresse au fluide voluptueux qui anime plantes, fleurs, insectes, oiseaux et papillons.

Aussi, quand le soleil de mai sourit à la terre son