Page:Luchet, etc. - Fontainebleau, 1855.djvu/285

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étoiles, et ces lustres inaccoutumés suspendus sur la cour de la Fontaine et sur l’étang, sur le feuillage et sur les pelouses, prodiguaient des clartés telles qu’on eût pu lire dans tous les esprits à travers tous les visages.

— A quelle fête assisté-je donc ? me dis-je tout éperdu, regardant machinalement du côté du grand bassin… Nouveau spectacle ! Les carpes étaient montées toutes à la surface de l’étang et en étaient sorties jusqu’à mi-corps. Leur nombre était si grand, qu’en aucun endroit l’eau ne se voyait plus ; et leurs yeux et leurs écailles brillaient si fort, que mon regard fut obligé de s’écarter. Toutes avaient les yeux tournés vers le théâtre ; mais elles ne cessaient point de fredonner, de se parler entre elles, et leurs propos continuaient de satisfaire à mes curiosités.

« Voilà le roi, disaient les unes, et voici la reine. Marie Leczinska, qu’il a épousée à Fontainebleau. — Là, c’est le Dauphin : il engendrera trois rois et mourra sans régner ; et là, c’est Christian, roi de Danemark, à qui l’on offre cette fête, en l’honneur de qui se donne la première représentation de l’opéra nouveau.

— Quel opéra ? demandai-je sans qu’on me répondît.

« Voilà Diderot avec Grimm, reprenaient les autres, et, non loin d’eux, cet homme aux lèvres impitoyables, au nez d’inquisiteur, aux petits yeux pleins de regards profonds, au front qui sait tout, c’est Voltaire ; il a, ce