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chose comme Géryon, que les peintres représentent avec trois têtes et six bras. C’est, à mon avis, l’emblème de trois amis qui agissent toujours de concert, comme le doivent ceux qui s’aiment.

Toxaris. Tu as raison : agissons ainsi.

63. Mnésippe. Mais pas de sang, Toxaris, pas de cimeterre ; nous n’en avons pas besoin pour affermir notre amitié. L’entretien que nous venons d’avoir et la conformité de nos sentiments seront des garants plus certains de notre constance que la coupe où vous buvez : car en ceci, c’est, selon moi, la volonté. non la nécessité qui fait tout.

Toxaris. Je t’approuve : soyons donc amis, soyons hôtes ; tu seras le mien en Grèce, et moi le tien, si jamais tu viens un Scythie.

Mnésippe. Sois-en certain : je ne balancerais pas à aller plus loin encore, si je devais y trouver des amis tels que tes discours, Toxaris, t’ont fait voir à mes yeux.



XLII

LUCIUS OU L’ÂNE[1].




l. J’allais un jour en Thessalie : j’avais à y régler, pour mon père, une affaire d’argent avec un homme du pays. Un cheval me portait, moi et mon bagage ; j’étais accompagné d’un valet. Nous suivions la route ordinaire, lorsque je rencontrai quelques

  1. Quelques éditeurs doutent que cette piquante histoire soit de Lucien. Le fond, sans doute, ne lui appartient pas ; c’est une de ces fables milésiennes, dont la liberté s’égayait parfois jusqu’à la licence ; mais les détails et le style ne sont pas indignes de notre spirituel écrivain, et d’excellents critiques n’hésitent point, pour ces motifs, à lui en attribuer, sinon l’invention originale, au moins la rédaction vive et amusante. Voy., pour plus de détails, la préface de la traduction de P. L. Courier ; A. Pierron, Hist. de la litt. gr. ; Belin de Ballu, traduction de Lucien, t. III, p. 175. Cf. Apulée, Métamorphoses, traduction de V. Bétolaud.