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LA FIN DE RABEVEL

Olivier dans ses études ; le jeune Régis, plus intuitif, moins livresque, goûtait, choisissait et laissait ce qu’il voulait. Souvent Bernard parlait de lui avec Marc. Nul ne pouvait mieux lui faire connaître son fils. Les deux jeunes gens étaient en effet de grands amis. Leur dissemblance profonde, leur don commun de sympathie s’alliait dans l’étude réciproque dont ils étaient l’un pour l’autre l’objet passionné. Jamais Marc n’avait encore pressenti, malgré l’expérience intellectuelle dont il était redevable à sa rare culture, qu’il put exister un être aussi particulier, aussi distinct de tous les types que son habituelle rigueur avait depuis longtemps catalogués.

Il l’initiait à la littérature. Mais, là même, les goûts de son ami laissaient Marc perplexe. Olivier découvrait dans les classiques une flamme que lui-même ne discernait que par les commentaires de son nouvel ami. Pascal lui était une terrible révélation. Les modernes aiguisaient sa sensibilité d’un métal tellement pur, mais les inquiétudes de l’âme contemporaine lui demeuraient encore mystérieuses. Apte à percevoir et à organiser avec raffinement toutes les émotions, il savourait les amertumes, il ouvrait un large cœur à toutes les voix imaginaires, mais ne se prêtait point à la tendance romantique qui, de trop de jeunes gens, fait des Werther et des René.

— Je sais bien, disait-il, en parlant du romantisme avec Marc, je sais bien que la nature est une grande amie vivante, je la connais bien, puisque je la crée. Elle se plaint, elle se