Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome III (1923, NRF).djvu/148

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
148
LE MAL DES ARDENTS

— Comment ? Songerait-il à s’en aller ?

— Sans doute. Ne le saviez-vous pas ?

— Mais il suffit que vous vous y opposiez, en ne lui réservant pas de place sur vos bateaux, par exemple, pour qu’il ne parte pas !

— Vous croyez ?

— C’est de toute évidence, voyons !

Rabevel baissa les paupières pour cacher la joie dont brillait son œil.

— Je le crois aussi, finit-il par dire. Mais vous me demandez de jouer là un rôle qui n’est pas le mien.

Elle pâlit.

— Le rôle de son père, dit-elle douloureusement. Ne l’êtes-vous pas ?

— Le rôle de votre mari, répondit-il en la regardant fixement.

Elle ne put réprimer un mouvement de détresse et de surprise.

Quoi ! c’était là l’orage que couvait ce long calme ?

Il la devina et dit cyniquement :

— Je n’ai pas cessé une minute d’y songer depuis que vous êtes à Paris.

Elle fit un geste de désespoir. Il reprit :

— Oui, Angèle, mienne tu as été, mienne tu restes ; je ne peux t’oublier. Tu ne t’imagines pas à quelle patience j’ai dû faire appel pour ne pas céder à ma passion, pour ne pas venir chez toi te supplier, te convaincre, te faire violence, Angèle, tu entends, te faire violence s’il l’avait