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LA JEUNESSE DE RABEVEL

— Cochon, hurla Mulot, bougre de cochon ! Il a fait ça à vingt ans ! Qu’est-ce qu’il saura faire à cinquante, le salaud !

Le banquier n’en revenait pas.

— C’est qu’il a tout prévu, fit-il à mi-voix comme à soi-même, on ne peut rien, rien. Nous voilà associés en fait, et, encore, à condition qu’il le veuille.

Il mit la main sur l’épaule de Bernard.

— Vous voilà en selle, dit-il d’une voix grave où tremblait la rancune. Si vous devez marcher avec nous il faut nous épouser tout à fait ou pas du tout.

— Moi je veux bien. Qu’est-ce que vous m’offrez ? 

— Je vous offre de participer à nos affaires dans la proportion où vous nous céderez une part de celle que vous venez de réussir si brillamment sur notre dos. Ainsi nous ne pourrons pas nous trahir mutuellement. Ça vous va ? 

— En principe oui. Reste à savoir ce que c’est que vos affaires.

— Nous vous mettrons au courant.  Tenez, pour commencer, nous sommes fortement engagés dans la maison de Bordes, l’armateur ; voulez-vous étudier la position, aller à Bordeaux et, au retour, nous dire si un échange de parts vous paraît possible ?

— Qu’est-ce qu’il manigance ? se dit Bernard. Mais il avait beau réfléchir, il n’apercevait aucun danger. « Après tout, le vieux est peut-être sincère, il a envie de participer aux asphaltières qui sont une bonne affaire et de pouvoir