Page:Lucile de Chateaubriand, ses contes, ses poèmes, ses lettres.djvu/19

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les corridors noirs, les galeries dans lesquelles on se perd, les grandes salles à poutres sculptées, où le jour ne pénètre qu’à travers les profondes embrasures des fenêtres en trèfle, les caveaux, les souterrains, toutes ces constructions faites pour une chevalerie sans cesse en garde, prenaient dans ce temps de paix un aspect monstrueux, absurde et vénérable.

Les enfants découvraient à ce géant de pierre mille caractères terribles et curieux. Naturellement le château était hanté par des spectres. On entendait quelquefois, la nuit, une jambe de bois monter seule avec un chat noir les escaliers de la grosse tour. C’était la jambe de bois d’un comte de Combourg, amputé au temps de la Belle au Bois dormant. Comme on devait trembler aux récits circonstanciés des servantes ! Les enfants se donnent des peurs délicieuses. Ils voient des fantômes, ils sont vraiment poètes. Lucile eut aussi des sujets d’émotion plus qu’à demi réels, bien que