Page:Lucile de Chateaubriand, ses contes, ses poèmes, ses lettres.djvu/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

y amena un jour un jeune conseiller au parlement de Bretagne, dont le nom rappelait la légende encore récente et toute vive d’un jeune poète mort de génie et de misère. Il se nommait M. de Malfilâtre et était cousin de l’auteur du Génie de Virgile. Lucile l’aima. Il n’en sut rien et partit. Elle retomba dans sa solitude et s’y rongea. René, titulaire d’un brevet de sous-lieutenant au régiment de Navarre, quitta Combourg. Bientôt après, le 6 septembre 1786, à l’heure où la cloche sonnait le souper familial, M. le comte de Chateaubriand tomba mort subitement. L’apoplexie foudroyante épargna l’embarras des adieux à cet homme qui n’avait jamais prononcé de sa vie une parole de tendresse. Lucile, alors chanoinesse de l’Argentière, attendait son transfert au chapitre de Remiremont. Ce canonicat séculier n’enlevait pas à la vie mondaine ses nobles affiliées, et ce n’était qu’une manière de dotation pour les cadettes de grande maison. Lucile put faire les preuves de seize quartiers qu’on exigeait à Remiremont.