Page:Lucrèce, Virgile, Valérius Flaccus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/165

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v. 951. Quur non, ut plenus vitæ conviva, recedis ? On connaît la belle et touchante imitation que notre poëte Gilbert nous a laissée de cette image.

Au banquet de la vie, infortuné convive,
      J’apparus un jour, et je meurs ;
Je meurs ! et, sur la tombe où lentement j’arrive,
      Nul ne viendra verser des pleurs.

v. 1038. Lumina sis oculis etiam bonus Ancu’ reliquit. Ancus Martius, quatrième roi de Rome, fils d’une fille de Numa. Son caractère, dit Tite-Live, était un mélange de celui de Numa et de celui de Romulus. Il mourut l’an de Rome 138, après un règne de vingt-quatre ans.

v. 1042. Ille quoque ipse, viam qui quondam per mare magnum. Xerxès Ier, cinquième roi de Perse, et second fils de Darius.

v. 1080. Aut etiam properans urbem petit atque revisit. Horace a imité ce passage dans la satire VII :

Non horam tecum esse potes ; non otia recte
Ponere, etc.

Boileau, à son tour, reprend l’idée d’Horace, et se l’approprie par les détails qu’il y ajoute :

Un fou rempli d’erreurs, que le trouble accompagne,
Et malade à la ville ainsi qu’à la campagne,
En vain monte à cheval, pour tromper son ennui :
Le chagrin monte en croupe, et galope avec lui.






LIVRE IV.


v. 73. Et volgo faciunt id lutea russaque vela. Les théâtres des Romains étaient tendus de rideaux, de tapisseries, de voiles, dont les uns servaient à orner la scène, d’autres à la spécifier, d’autres à la commodité des spectateurs. Ceux qui servaient d’ornement étaient les plus riches, et ceux qui spécifiaient la scène représentaient toujours quelque chose de la pièce qu’on jouait. Les voiles tenaient lieu de couverture, et l’on s’en servait pour la seule commodité des spectateurs, afin de les garantir des ardeurs du soleil. Catulus, le premier, imagina de revêtir tout l’espace du théâtre et de l’amphithéâtre de voiles étendus sur des cordages qui étaient attachés à des mats de navire, ou à des troncs d’arbres fichés dans les murs. Ces mêmes voiles devinrent dans la suite un objet de luxe. Lentulus Spinther en fit faire de lin d’une finesse jusqu’alors inconnue. Néron non-seulement les fit teindre en pourpre, mais y ajouta des étoiles d’or, au milieu desquelles il était peint monté sur un char ; le tout travaillé avec tant d’adresse et d’intelligence, qu’il paraissait comme un Phébus qui, modérant ses rayons, ne laissait se glisser qu’un demi-jour agréable.

v. 158. Perpetuo fluere ut noscas e corpore summo Texturas rerum tenuies. On aurait droit de demander à Lucrèce comment les émanations abondantes et continues n’épuisent pas promptement les corps ; mais Épicure répond qu’il se fait un échange continuel d’émanations réciproques, et qu’au moyen de ces compensations alternatives, l’épuisement se fait moins sentir ; il y a d’ailleurs un autre exemple plus favorable à ce système : ce sont les corps odorants, auxquels l’émanation de leurs parfums pendant des siècles ne fait point éprouver d’altération sensible.

v. 218. … Quæ feriant oculos, visumque lacessant. Il faut remarquer combien la théorie des anciens, sur la vision, était ingénieuse ; Lucrèce nous la développe avec beaucoup de clarté et d’élégance. Les détails minutieux sont relevés par les charmes d’une poésie pittoresque et gracieuse ; il est impossible de rassembler plus de difficultés, et de les vaincre plus heureusement.

Il est curieux de comparer le mécanisme que les anciens supposaient pour opérer l’action de la vue, au système supposé par les modernes. Les stoïciens pensaient que de l’intérieur de l’œil s’élancent à sa surface des rayons visuels, qui poussent l’air, le compriment et l’appliquent contre les objets extérieurs. De sorte que, dans leur système, il se fait une espèce de cône, dont le sommet est à la surface de l’œil, et la base posée sur l’objet aperçu. Or, disent-ils, de même qu’en tenant à la main un bâton, on est instruit, par l’espèce de résistance qu’on éprouve, de la nature du corps touché, s’il est dur ou mou, poli ou raboteux, si c’est de la boue ou du bois, de la pierre ou une étoffe ; de même la vue, au moyen de cet air ainsi comprimé, est instruite de toutes les qualités de l’objet qui sont relatives à la vue, s’il est blanc ou noir, beau ou difforme, etc.

Selon Aristote, la chose se passait tout différemment : c’était la couleur même des objets extérieurs qui excitait, et, pour employer ses propres termes, qui réduisait à l’acte la faculté d’être éclairé, qui appartient à l’air, perspicuum actu ; et à l’aide d’une propagation non interrompue dans l’air interposé entre l’objet et l’œil, l’organe était mis en vibration par son moyen, le sensorium intérieur étant ébranlé, d’où s’ensuivait la perception des objets. Ainsi, dans les principes de ce philosophe, l’air fait la fonction du bâton, comme chez les stoïciens ; mais c’est l’objet extérieur qui est la main, et l’œil qui est le corps touché. Chaque explication est donc ici l’inverse de l’autre. Dans la première, le mécanisme de la vision commence par l’œil, et se termine aux objets extérieurs, par le véhicule de l’air ; dans la seconde, il commence par les objets extérieurs, et se termine à l’œil, aussi par le véhicule de l’air.

Les pythagoriciens réunissaient dans leur explication ces deux mécanismes si opposés. Ils croyaient que les rayons visuels, élancés de l’œil, allaient frapper les objets extérieurs, et qu’ils étaient de là réfléchis vers l’organe. C’étaient des espèces de messagers députés par l’œil vers les objets extérieurs, et qui, à leur retour, faisaient leur rapport à l’organe.

Dans les principes d’Épicure, tout se passait par des simulacres, des images, des effigies substantielles, qui, en venant frapper l’œil, y excitaient la vision. C’était là que se bornait tout le mécanisme. Il n’était pas nécessaire que les simulacres traversassent les différentes humeurs des yeux, qu’ils ébranlassent la rétine, qu’ils affectassent le sensorium, puisque l’âme, selon la doctrine d’Épicure, était dans les yeux comme dans le sensorium.

Dicere porro oculos nullam rem cernere posse…

Les modernes expliquent ainsi le mécanisme de la vision. Ils conviennent tous qu’elle se fait par des rayons de lumière, réfléchis des différents points des objets reçus dans la prunelle, réfractés et réunis dans leur passage à travers les tuniques et les humeurs qui conduisent jusqu’à la rétine ; et qu’en frappant ainsi, ou en faisant une impression sur les points de cette membrane, l’impression se propage jusqu’au cerveau, par le moyen des filets correspondants du nerf optique.

v. 619. Principio, sucum sentimus in ore, cibum quom Mandundo exprimimus. L’explication que le poëte fait ici de la sensation du goût est exactement conforme à celle qu’en donnent les physiologistes modernes ; ils partent du même principe que Lucrèce ; mais ils ont poussé plus loin les détails anatomiques, et les procédés chimiques sur la décomposition des corps savoureux.

v. 673. Utraque enim sunt in mellis commixta sapore. Ce vers n’est que la répétition de ce que le poëte a dit ailleurs.