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Page:Lucrèce - De la nature des choses (trad. Lefèvre).djvu/24

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XVIII
PRÉFACE

le milieu historique et moral, qui ont formé la pensée de Lucrèce et guidé son inspiration. C’est maintenant dans son œuvre que nous allons étudier le philosophe et le poëte.



II


Le De rerum natura s’ouvre par une célèbre invocation à Vénus, que certains aveugles volontaires ont assez puérilement taxée d’inconséquence. Lucrèce a choisi pour muse une déesse à laquelle il ne croit pas plus qu’à Cybèle ou à Neptune. Il y a été déterminé par de puissantes raisons patriotiques et philosophiques.

Vénus était regardée par les Romains comme la mère et le symbole de leur race ; le culte associait sur les mêmes autels Rome et Vénus. N’était-il point délicat et de bon goût, en transplantant à Rome une doctrine étrangère, de dire aux lecteurs : « Le matérialisme désormais est romain ; il nous appartient d’autant mieux qu’il est représenté dans notre vieil Olympe par notre divinité nationale. Le souverain but d’Épicure, est le plaisir (on expliquera ce mot) : Vénus est la volupté. La réalité des choses est le développement de la substance féconde : Vénus est la fécondité. Épicure enseigne le calme des sens et de l’esprit : or une intelligente mythologie fait de Vénus la toute-puissante maîtresse du dieu de la guerre. Pourquoi ne pas nous emparer de ce symbolisme,