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LIVRE CINQUIÈME

Mais il se peut aussi que, des deux bouts du monde,
S’élèvent deux courants aériens, dont l’onde
Régulière, des cieux où rit l’été vermeil,
Vers les climats glacés transporte le soleil,
Puis, des lieux où le froid obscurcit la lumière,
Vers les signes brûlants lui rouvre une carrière.
De semblables reflux opposés et certains
Peuvent guider la lune et ces astres lointains
Dont l’ample orbite embrasse un long cycle d’années.
Vois au souffle des vents diverger les traînées
Des nuages, et ceux qui gardent les hauteurs
Se mouvoir au rebours des bancs inférieurs !
Pourquoi donc le retour de semblables marées
Ne bercerait-il pas les flammes éthérées ?

L’ombre épaisse des nuits envahit l’univers
680Quand le soleil exhale, aux limites des airs,
Les restes languissants de sa flamme, émoussée
Par les chocs et les flots de cette traversée ;
Ou quand l’impulsion qui l’élevait aux cieux
Entraîne sous nos pieds son vol mystérieux.
Et quand chaque matin l’aurore fraîche éclose,
Présent de Matuta, luit sur l’horizon rose,
C’est qu’au ciel reconquis annonçant son retour,
L’astre lance des traits avant-coureurs du jour ;
Ou que l’afflux constant de semences ignées,
Au temps fixé groupant leurs forces combinées,
Forme un soleil nouveau qui n’avorte jamais.
Ainsi, dit-on, l’Ida sur ses hautains sommets
Rassemble au point du jour les feux de l’atmosphère