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LIVRE SIXIÈME

Là, s’ouvrent des conduits qui, des sables marins,
Montent jusqu’au sommet. C’est dans ces souterrains
Que le vent s’insinue et, par d’étroits passages,
S’élance en tourbillons de flammes, en nuages
De poussière et de rocs épars. Au haut des monts
S’évasent vers les cieux ces puits que nous nommons
Les bouches du volcan, soupiraux de la terre,
Dont les Grecs ont nommé l’orifice cratère.

Mais parfois, dans le doute, il faut donner d’un fait
720Plusieurs motifs, dont l’un s’est produit en effet.
De loin, tu vois un corps gisant. Il est sans vie.
Peux-tu prouver comment l’âme lui fut ravie ?
Froid, maladie ou fer, poison peut-être : c’est
Quelqu’une de ces morts ; mais laquelle, on ne sait.
Il te faut donc compter avec toutes ces causes.
C’est ce que nous ferons pour beaucoup d’autres choses.

Pourquoi l’unique fleuve égyptien, le Nil,
Grossit-il en été ? Pourquoi déborde-t-il
Juste quand les chaleurs ont desséché les plaines ?
Peut-être l’aquilon, raidissant ses haleines,
Debout au seuil des mers, l’arrête et le remplit
Du reflux de ses flots refoulés dans son lit,
C’est la saison des vents étésiens ; leur course,
Partant comme l’on sait, des cieux glacés de l’Ourse,
Directement s’oppose au progrès de ces eaux
Qui, parmi les tribus australes, noirs troupeaux
Humains, tout pénétrés des flammes du Tropique,
Coulent du sein profond de la brûlante Afrique.