Page:Lumbroso - Souvenirs sur Maupassant, 1905.djvu/139

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solide des gloires. Qu’il dorme donc son bon sommeil, si chèrement acheté, confiant dans la santé triomphante de l’œuvre qu’il laisse ! Elle vivra, elle le fera vivre. Nous qui l’avons connu, nous resterons le cœur plein de sa robuste et douloureuse image. Et, dans la suite des temps, ceux qui ne le connaîtront que par ses œuvres l’aimeront pour l’éternel chant d’amour qu’il a chanté à la vie ».

C’est ainsi que cette « bonne tête limpide et solide » (les mots sont de M. Émile Zola) s’est éteinte dans une maison d’aliénés. Mais Maupassant était-il né malade d’esprit, comme le soutient le docteur Max Nordau ? Nous ne saurions accorder notre confiance à cette conclusion du célèbre écrivain allemand, que l’ « aliénation mentale notoire dans laquelle Maupassant finit, ne fut que le chapitre final d’un sombre roman pathologique dont le début remonte dans son hérédité ».

Tous les documents recueillis, tous les témoignages groupés, tous les faits rassemblés, me prouvent que c’est le professeur Morselli qui a raison lorsqu’il m’écrit que Maupassant est né parfaitement sain. Il était digne de l’éloge qu’en fit Zola : Maupassant est la santé, la force même de la race. Sa folie n’est que la conséquence d’une maladie que tout autre eût pu avoir à sa place. L’hérédité est hors de cause[1].

  1. Le tort de Maupassant est d’avoir empiré son sort, d’avoir accéléré sa folie, par son genre de vie. Dois-je rappeler la belle pièce de M. Brieux, les Avariés, si sottement interdite par la censure théâtrale à Paris, et toute la série de bonnes doctrines qu’elle proclame ? Il est cer-