On avait oublié que, dans cette famille, où les nerfs sont si facilement à nu, les divisions étaient profondes.
Deux fils étaient nés de cette union qui connut les orages : l’un, Hervé de Maupassant, devait n’être que la loque humaine que la terre a dissoute dans le cimetière de Bron[1] ; l’autre, appelé à finir de même, devait être d’abord le fils illustre et glorieux. Celui-là, comme on se disputait sa tendresse, comme on se disputait son souvenir ! Vous la rappelez-vous la révolte de la mère, lorsque courut cette sotte invention d’un prétendu frère de lait de Maupassant, gardien au square Solférino ? C’était, il y a à peine trois ans... Mme de Maupassant protesta :
« J’ai été la nourrice de mon fils Guy et je ne permettrai à personne d’usurper ce titre. Je ne suppose pas, en effet, qu’une personne étrangère puisse s’arroger un pareil droit, pour avoir, pendant quatre ou cinq jours, à peine, allaité mon enfant. Je me trouvais à Fécamp, chez ma mère, lorsque je fus atteinte d’une indisposition assez légère. C’est alors qu’une femme Cavalier, fille d’un fermier voisin, fut appelée pour me venir en aide ; c’est là tout : la semaine n’était point écoulée que je reprenais possession entière de mon cher nourrisson qui ne fut sevré qu’à l’âge de vingt mois...».
- ↑ On parle trop peu d’Hervé. Sa mère l’estimait beaucoup aussi. Son esprit était tourné vers les sciences et il serait arrivé à une certaine réputation comme botaniste. M. Balestre m’apprend (3 août 1904) qu’il a laissé un herbier de grande valeur qui a été détruit dans un incendie qui, il y a un an, a dévoré les collections de la Société des Lettres, Sciences et Arts des Alpes-Maritimes. [A. L.].