Page:Lumbroso - Souvenirs sur Maupassant, 1905.djvu/203

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des mots infiniment tendres et dont je suis ému. Elle me dit ce qu’était son fils, sa générosité, sa fierté, sa bonté, ses vertus que les indifférents ignoraient, car il avait la pudeur de ne les pas étaler. « Nous nous adorions tous deux. Il avait pour moi d’exquises délicatesses ». Il se proposait de visiter, avec Huysmans, les musées de Hollande. Il apprend que sa mère est seule, à Étretat, attristée par un chagrin domestique. Il renonce à son voyage, mais il lui laisse croire que ce voyage a manqué par la faute de Huysmans, ne voulant pas avoir l’air de se priver d’un plaisir et l’affliger par l’idée de ce sacrifice. « Je pourrais vous citer mille traits semblables ». Guy vivait avec sa mère dans une complète intimité de cœur et d’esprit. Elle s’intéressait passionnément à ses travaux. Elle lui trouvait des sujets. La plupart de ses histoires normandes, qui ont si forte saveur de terroir, lui ont été suggérées par elle. C’étaient des anecdotes, des racontars qu’elle recueillait et dont il retenait la substance. Il méditait longtemps sur ses romans et ses contes. Lorsqu’il prenait la plume, l’œuvre était achevée dans son cerveau. Sa production paraissait aisée, mais elle était précédée d’une préparation laborieuse.

« Je le vois encore, descendant tout heureux, se frottant les mains : — Je viens de gagner 500 francs ! »

Il avait mis trois heures à écrire Mouche, une

    pensée de sa mère et, quand elle revit de souvenir les jours lointains de bonheur, son cœur est distrait un moment du deuil sans pareil qui l’accable », m’écrit le docteur Balestre (27 août 1901). [A. L.].