Page:Luzel - Cinquième rapport sur une mission en Basse-Bretagne, 1873.djvu/13

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tromper d’un seul grain, et que ce soit fini pour le coucher du soleil. Puis elle s’en alla.

Louis appela à son secours les fourmis, et le triage fut fait on ne peut mieux, pour l’heure dite. Aussi, quand la princesse revint, au coucher du soleil, fut-elle bien étonnée. Elle examina l’ouvrage, et, ne trouvant pas un seul grain d’une espèce différente dans chacun des trois tas :

— C’est fort bien, dit-elle.

— Viendrez-vous avec moi, à présent ? lui demanda Louis.

— Pas encore ; j’ai autre chose à vous demander, auparavant.

En effet, le lendemain matin, elle lui donna une cognée de bois, et, l’ayant conduit dans la grande avenue du château, elle lui dit, en lui montrant les grands chênes :

— Il faut m’abattre tous ces arbres, avant le coucher du soleil, avec votre cognée de bois. Puis elle s’en alla.

Dès que la princesse fut partie, Louis appela les lions à son secours, et, quand elle revint, au coucher du soleil, il n’y avait plus un seul arbre debout, dans l’avenue. Son étonnement ne fit qu’augmenter.

— Me suivrez-vous, à présent, princesse ? lui demanda Louis.

— J’ai encore un autre travail, une dernière épreuve à vous donner, répondit-elle, et si vous vous en tirez aussi heureusement que des deux autres, rien ne s’opposera plus à ce que je vous suive.

Le lendemain matin, la princesse le conduisit au pied d’une grande montagne et lui dit :

— Voici une montagne qui offusque mon palais et m’empêche de voir au loin, et je désire qu’elle ait disparu pour le coucher du soleil. Et elle s’en alla encore.

Louis appela, cette fois, les éperviers à son secours, et, avec leurs becs et leurs griffes, ils eurent bientôt, tant ils étaient nombreux, fait disparaître la montagne et aplani le terrain. Quand la princesse revint, au coucher du soleil :

— Eh bien ! princesse, êtes-vous satisfaite ? lui demanda Louis.

— Oui, répondit elle, vous n’avez pas votre pareil au monde, et, à présent, je vous suivrai, quand vous voudrez.

Et elle lui donna alors un baiser. Ils se dirigèrent ensuite vers la mer. Le bâtiment sur lequel Louis était venu dans l’île était toujours là, l’attendant. Ils montèrent dessus et abordèrent sans encombre au continent. Pendant le trajet, la princesse laissa tomber dans la mer la clef de son château, sans en rien dire à Louis[1]. Le vieillard les attendait de l’autre côté de l’eau.

  1. Il doit y avoir plus loin une lacune, concernant cette clef que le héros du conte doit retrouver. Dans d’autres versions, il doit aussi apporter le palais de la princesse devant celui du roi, et même aller quérir de l’eau de la vie et de l’eau de la mort.