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Page:Luzel - Contes bretons, Clairet, 1870.djvu/68

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douze ans, ce que votre femme porte présentement de plus précieux, et je vous donnerai cent écus à l’instant même.

Le paysan promit imprudemment, ne se doutant pas de ce que lui coûterait un jour un tel engagement. L’inconnu lui compta alors cent écus, et le fermier alla payer son seigneur, sans autre souci.

Au retour, il raconta à sa femme ce qui lui était arrivé.

— Ah ! malheureux, qu’as-tu fais ? lui dit celle-ci. Ce seigneur inconnu ne peut être que le Diable, et tu lui as vendu ton enfant, car je suis enceinte !

Et les voilà de se désoler et de pleurer ensemble.

— Et que faire, mon Dieu ?

— Il faut consulter M. le recteur (le curé).

Et ils se rendirent tous les deux au bourg, et racontèrent tout à leur recteur. Celui-ci, après avoir réfléchi, leur dit : Il faudra me donner pour parrain à l’enfant, quand il sera né ; la Sainte-Vierge sera sa marraine, et peut-être parviendrons-nous, de la sorte, à annuler le pacte fatal.

L’enfant vint au monde, quand son temps fut arrivé. C’était un superbe garçon. Il fut baptisé, et on lui donna pour parrain le curé de la paroisse, et pour marraine la Sainte-Vierge, comme c’était convenu. Il fut nommé Pipi. On le mit en nourrice, et il venait à merveille. À l’âge de huit ans, on l’envoya à l’école, chez des moines qui étaient dans le voisinage. Il apprenait bien et l’on était très content de lui. Mais on s’aperçut bientôt qu’il