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Page:Luzel - Contes bretons, Clairet, 1870.djvu/93

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— Oui vraiment ; il faut le faire cuire.

— Si vous saviez ce qu’il m’a dit !

— Qui ? le poisson ? —

— Oui, le poisson.

— Et que vous a-t-il donc dit ?

— Qu’il faut vous donner sa chair à manger, son cœur, avec l’eau qui aura servi à le laver, à notre jument, et ses entrailles et ses poumons, à notre chienne.

— Alors il faudra faire comme il a dit.

On fit cuire le poisson, et la femme du pêcheur mangea sa chair, la jument mangea son cœur et la chienne, ses entrailles. —

Tôt après, la femme du pêcheur accoucha et elle donna le jour à deux jumeaux, deux enfants superbes. Ils se ressemblaient si bien, qu’il fallut mettre un ruban au bras de l’un d’eux, pour les distinguer l’un de l’autre. La jument aussi eut, le même jour, deux petits poulains, qui se ressemblaient parfaitement, et la chienne mit bas également deux petits chiens qu’il était impossible de distinguer l’un de l’autre.

— À merveille ! dit le pêcheur ; un poulain et un chien pour chacun de nos enfants.

Les deux enfants venaient bien. Quand ils furent arrivés à l’âge de quinze ou seize ans, l’un d’eux dit à ses parents qu’il s’ennuyait à la maison et qu’il voulait voyager. Son père, sa mère et son frère firent de vains efforts pour le retenir ; — il fallut le laisser partir. Mais avant de se séparer, il recommanda à son frère d’aller tous les matins, en se levant, donner un coup de couteau dans le tronc d’un laurier qui se trou-