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L’HÉRITIÈRE DE KEROULAZ
________


I

Je voudrais être petite colombe blanche
À Keroulas, sur le toit :
Je voudrais être sarcelle,
Sur l’étang où elle lave ses vêtements,

Afin de voir ma douce héritière,
Qui lave blanc comme le lait….
………………………………………………………………………

— Bonjour à vous, ma douce héritière,
Pourquoi êtes-vous lavandière ?
Assez de servantes sont dans la maison de votre père,
Pour vous laver vos vêtements.

— Je suis venue laver mon linge clair (fin),
Pour passer le temps seulement.
Seigneur de la Ronce[1], dites-moi,
Pourquoi êtes-vous venu me voir à pied ?

Assez de chevaux sont chez votre père,
Pour vous porter jusqu’à Keroulas.
— J’ai une haquenée blanche,
Avec une bride d’argent en tête,

Les coins de ses deux hanches dorés,[2]
Bonne pour vous porter, héritière.
— Seigneur de la Ronce, excusez-moi,
Je ne mérite pas d’aller à cheval ;

Mais dans un carrosse bien accoutré,
Avec huit chevaux pour le traîner ;
Je dis un carrosse doré,
Sur quatre roues d’argent.

— Petite héritière, vous êtes fière,
Et le monde parle de vous…
— Pourquoi le monde parle-t-il mal de moi,
Qui possède cinq mille écus de rente ?


  1. Ce seigneur de La Ronce, ou de La Roncière, est peut-être une interpolation arbitraire, car on ne le voit pas figurer dans la touchante histoire de l’infortunée héritière.
  2. Sans doute les coins des housses retombant des deux côtés sur les flancs du cheval.