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  Et fais en mettre trois à Saint-Efflam,
Pour que j’aille au paradis, sans tache.

  Quand Locrénan entendit cela,
Il monta sur son cheval ;

  Il monta sur son cheval,
Et se rendit à Lezormel.

  La marquise disait
À sa petite servante, cette nuit-là ;

  Mettez la broche au feu,
Je vois Des Tourelles qui vient souper.

  Et Locrénan disait
À la marquise, là, en ce moment :

 — Ne mettez pas la broche au feu,
Des Tourelles ne viendra pas souper ;

  Il est sur la Lieue-de-grêve, couché sur la bouche,
Que le seigneur Dieu lui pardonne ;

  Il est sur la Lieue-de-grêve, au milieu de son sang,
Que le seigneur Dieu le console.

III

  Dur eût été de cœur celui qui n’eût pleuré,
S’il eût été à la Lieue-de-grêve,

  En voyant la marquise, pleine de deuil,
Embrasser le corps mort !

  Et Locrénan disait
À la marquise, là, en ce moment :

  Laissez-moi Kervégan[1],
Je ferai juger sa vie ![2]


Chanté par une Servante d’Auberge,
au bourg de Plestin. — 1864.


  1. Kervégan habitait la paroisse de Plouzélambre, canton de Plestin, arrondissement de Lannion. — Ses violences de toutes sortes défrayent encore les traditions des paysans, dans les environs.

    Le château de Lezormel et le manoir de Locrénan sont en Plestin, commune contigüe.
  2. On m’a montré près le bourg de Plouzelambre, à cent cinquante pas, environ, de l’église, un petit oratoire assez élégant, en pierre de taille, où selon la tradition du pays, le seigneur de Kervégan, exclu de l’église, pour quelque crime, sans doute, peut-être celui qui fait le sujet de cette ballade, se tenait les dimanches, pendant la grand’messe, et priait à haute voix, de manière à être entendu du prêtre qui officiait à l’autel et de tous les assistants.