Le vieux chevalier, quand il l’entendit,
Mit la tête à sa fenêtre :
— Si c’est Lizandré que vous demandez,
Jeune page, c’est à lui-même que vous parlez.
— Tiens, voilà une lettre, Lizandré,
Qui t’est envoyée de la part du roi.
— Si c’est le roi qui me l’a écrite,
Donnez-moi la, pour que je la lise.
— Il vous mande, reprit le petit page,
D’aller jouter contre son maure.
— Enseigne moi donc, petit page,
La manière et les ruses de guerre de son maure.
— Pour cela, je ne vous le dirai pas,
De peur que je fusse dénoncé.
— Aussi vrai que j’ai la mort à passer,
Petit page, je n’en parlerai jamais.
— Le maure sauvage, quand il sera entré dans la salle,
Jettera ses vêtements à terre sur-le-champ :
Faites comme lui ; et quand il fera un saut en l’air,
Présentez votre épée pour le recevoir.
Aussitôt que vous le verrez dégainer,
Jetez-lui de l’eau bénite ;
Quand il vous demandera de se reposer,
Ne lui donnez point de relâche.
Car celui-là a avec lui des herbes
Qui ne sont pas longtemps à guérir les blessures.
— Tenez, jeune page, voilà cent écus.
Puisque vous m’avez averti avec vérité ;
Sans vous, j’eusse été tué,
Et ma pauvre mère en eût été désolée.
Le seigneur de Lizandré disait,
En arrivant dans la ville de Paris :
— Bonjour à vous, seigneur roi,
Pourquoi avez-vous besoin de Lizandré ?
— Je t’ai fait dire de venir jusqu’à moi
Pour jouter contre mon maure sauvage.
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