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VARIANTE


D’après une autre version, recueillie à Plouaret, ce n’est pas auprès du roi, à Paris, que se rend La Fontenelle, mais à Coat-an-Rinec, auprès du seigneur du Rinec. Je ne sais qui peut être ce seigneur du Rinec. mais on sait que, le 15 juillet 1602, le maréchal de Brissac envoyait à Charles Budes, sieur du Hirel, alors gourverneur de Moncontour, l’ordre d’arrêter Gui Eder de La Fontenelle partout où il le trouverait. Voici la variante à laquelle je fais allusion.


La Fontenelle disait,
En arrivant à Coat-an-Rinec :
— Bonjour et joie dans cette maison,
Le seigneur du Rinec où est-il ?

— Prenez un escabeau et asseyez-vous,
Prenez cette lettre et lisez-la.
— Cette lettre ne doit pas être si cruelle
Que je ne puisse la lire debout.

À peine l’avait-il ouverte,
Que l’eau lui tombait des yeux ;
il ne l’avait pas lue à moitié,
Qu’il demanda un escabeau pour s’asseoir.

— Donnez-moi un escabeau pour m’asseoir,
Et un peu de vin pour boire ;
Et un peu de vin pour boire,
Mon cœur est sur le point de se briser !….
………………………………………………………

Je vois venir l’héritière,
Et elle est entre deux princesses,
Elle tient à la main une écuelle d’argent,
Pour demander le prix du jugement ?[1]


  1. Gay Eder La Fontenelle, juveigneur de la maison de Beaumanoir, naquit en la commune de Bothoa, (Côtes-du-Nord), vers l’année 1572. — Ce fut le plus renommé et le plus considérable des chefs de partisans qui désolèrent la Bretagne sous la Ligue. Il se disait partisan du duc de Mercœur ; mais on doute si ce n’était pas là un prétexte pour excuser, autant que possible, ses brigandages et ses crimes. Il fut accusé devant le Grand Conseil d’avoir trempé dans la conspiration de Biron. Cette accusation resta sans preuve, et on fit revivre contre lui ses déportements et ses crimes antérieurs, quoi qu’il en eût été amnistié. Après avoir été soumis à la question ordinaire et extraordinaire, il fut roué vif en place de Grève, malgré sa qualité de gentilhomme, le 27 septembre 1602. Sa tête fut tranchée et envoyée à Rennes, où elle fut exposée sur l’une des tours de la porte Toussaint. Mais elle n’y resta pas longtemps : la garde organisée pour défendre ce triste trophée ne put empêcher qu’on l’enlevât.

    Le sujet de cette ballade et de la suivante a été fourni par une course qu’il fit à la sourdine, comme dit le chanoine Moreau, en Léon, jusques à Mesarnou, d’où il enleva la fille de la dame du lieu, Marie de Coadélan, riche de neuf à dix mille livres de rente, et âgée seulement de huit à neuf ans. —