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Amen ! répondit l’auditoire[1].

(Conté par Marguerite Philippe, 1870.)
  1. Cet épisode de la pénitence finale avec la ceinture garnie de pointes, et la clé jetée à la mer et retrouvée dans un poisson, se rencontre également dans un autre conte breton. Celui qui racheta son père et sa mère de l’enfer, et que l’on trouvent plus loin.
    Dans la légende de saint Grégoire le Grand, nous avons également la clé jetée à la mer et retrouvée dans un poisson, au bout de dix-sept ans.
    L’épisode du mort resté sans sépulture et venant au secours du héros du conte, qui lui a fait rendre les derniers devoirs, est assez commun dans les récits populaires. On le retrouve dans Straparole, dans les contes slaves, et aussi dans des contes bretons de ma collection, et avec cette seule différence que le mort s’y présente sous la forme d’un renard.
    Il existe également dans Souvestre : L’Heureux Mao ; Sébillot, Le Petit roi Jeannot, conte gallot ; W. Webster, Le Merle blanc, Jean de Calais, légendes basques.
    Un conte basque du recueil de M. Webster présente de nombreuses analogies avec le nôtre, quant à la marche générale. Il est intitulé : Le Cilice, et se trouve pages 206-209 des Basque Legends ; en voici l’analyse : Un gentilhomme fait vœu d’aller à Rome, s’il a un fils ; sa femme lui donne peu après un fils. Quand l’enfant arrive à l’âge de sept ans, il voit que son père est triste, et il finit par apprendre que c’est parce que sa femme n’a pas voulu le laisser accomplir son vœu.
    L’enfant se met en route, et, après avoir voyagé sept ans, il arrive chez le Saint-Père, qui le fait entrer dans une chambre où il reste une heure (il croit y être resté deux heures), puis dans une seconde chambre, où il demeure deux heures, et il pense y être resté trois heures. Il entre dans une troisième chambre, où le Saint-Père l’enferme pendant trois heures. Il croit n’y être resté que trois minutes. Alors, le Pape lui dit que la première chambre est l’enfer, la seconde le purgatoire, et la troisième le paradis.
    Dans le paradis (troisième chambre), il avait vu son père, et sa mère se trouvait dans la première, c’est-à-dire en enfer. Il veut la sauver à tout prix, et le Pape lui met un cilice fermé par un cadenas dont il jette la clé à l’eau.
    Il revient, après un long voyage, chez son père, qui lui demande des nouvelles de son fils. Sa mère veut le mettre à la porte ; mais le père le garde à dîner et dit à sa domestique d’aller acheter le meilleur poisson du marché aux poissons ; le garçon va avec elle pour le voir vider, et il y trouve la clé du cilice.
    La mère essaie de le noyer, mais il s’échappe et ne dit rien. Un jour, il lui demande si elle reconnaîtrait bien son fils.
    — Oui, dit-elle, à une marque qu’il a sur la poitrine.
    Il se découvre ; mais la marque n’existe plus, parce que sa poitrine était toute meurtrie. Peu après, ils meurent tous les trois, et la domestique voit leurs âmes s’envoler, sous la forme de trois colombes blanches.
    L’épisode du fils, mendiant, malade et inconnu chez ses parents, rappelle l’histoire de saint Alexis