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Amen ! répondirent les assistants[1].

(Conté par Jean le Person, cordonnier, au bourg de Plouaret.)
  1. Dans le conte de Moustache, que l’on trouve dans les Derniers Bretons, de Émile Souvestre, Ier vol., page 14) de la première édition, 1836, le héros rencontre aussi Jésus-Christ, saint Pierre et saint Paul voyageant en Basse-Bretagne, et déguisés en mendiants. Il partage avec eux son pain et reçoit en retour trois dons que Jésus-Christ lui dit de formuler à son choix. Ces trois dons consistent en une belle femme, un jeu de cartes qui gagne toujours et un sac pour y renfermer le diable. Comme dans notre conte, il loge dans un manoir hanté, y joue aux cartes avec plusieurs diables, les gagne tous, les fourre dans son sac et fait battre le sac sur l’enclume par tous les forgerons du pays ; puis, pour avoir délivré le manoir des diables qui le hantaient, le seigneur du manoir lui accorde la main de sa fille.
    Après sa mort, Moustache se présente aussi à la porte du paradis, puis de l’enfer, et nulle part on ne veut de lui. Il finit pourtant par s’introduire dans le paradis, par le même stratagème que dans notre conte, en y jetant son bonnet, en s’asseyant dessus et en réclamant le droit de rester sur son bien.
    Cette légende se retrouve un peu partout, avec de nombreuses variantes : pour la partie de cartes dont l’enjeu est des âmes damnées, voir, dans le recueil de Fabliaux ou Contes du XIIe et du XIIIe siècle, de Legrand d’Aussy : du Jongleur qui alla en enfer, aliàs : de saint Pierre et du Jongleur, t. II, p. 36. Comparez encore, pour la première partie, où il s’agit d’un château hanté, Sébillot, Contes populaires de là Haute-Bretagne, Jean-sans-Peur ; Deulin, Culotte verte ; Camoy, Bras d’acier, etc. Les trois souhaits (poirier chargé de fruits, fauteuil où l’on est forcé de rester, jeu qui gagne toujours) ont leurs similaires dans Deulin, le Grand choleur (orme sous lequel celui qui s’assied est forcé de rester, tablier de cuir d’où l’on ne peut faire déguerpir, crosse qui gagne toujours) ; la mort est aussi attrapée, mais moins complètement que dans le Poirier de Misère, du même auteur, qui ressemble beaucoup à la troisième partie de notre conte.
    L’épisode de la porte du paradis se retrouve dans Bras d’acier, de H. Carnoy, commenté par Kœhler (Zeitschrift für Romanische Philologie, t. III, p. 312); le Sac de la Ramée de Cénac-Moncaut ; Sébillot, Le Diable attrapé, n° xl ; Webster, Quatorze ; Jésus-Christ et le vieux soldat. À l’étranger, on la retrouve, outre les contes cités par M. Kœhler en Italie, cf. Monnier, p. 31-34 ; Prosper Mérimée, Federigo, dans Dernières nouvelles, p. 299, Paris, Michel Lévy, 1873, etc.