Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 2, 1881.djvu/219

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tourna alors dans son pays[1]. Quand elle arriva à la maison, personne ne la reconnaissait. Il y avait dix ans qu’elle était partie, et on n’avait pas eu de ses nouvelles depuis. Son mari, la croyant morte, s’était remarié. Sa fille aînée, qui l’aperçut arrêtée au seuil de la porte, comme une pauvre mendiante, lui dit d’une voix douce et compatissante :

— Entrez, ma pauvre femme ; ne restez pas dehors, par ce mauvais temps (c’était l’hiver).

Elle entra. Sa fille aînée, qui ne la reconnaissait toujours pas, mit de l’eau sur le feu, et quand elle fut tiède, elle pria la pauvre mendiante de lui permettre de lui laver les pieds. Alors elle reconnut sa mère à une marque qu’elle avait à la jambe gauche. Un de ses fils, qui était à l’école quand elle partit de la maison, était à présent prêtre. Il était là aussi :

— Jésus, mon Dieu ! dit la sœur à son frère, je crois que voici la mère qui nous a mis au monde !

Et ils se jetèrent dans les bras les uns des autres, en pleurant de joie et de bonheur. Le jeune prêtre mit sa mère dans son lit, et, s’agenouillant auprès d’elle, il resta là à la contempler

  1. Voir dans mes Guerziou Breiz-Izel, tome I, page 85, un épisode semblable, sous le titre de : Les trois femmes coupables.