Aller au contenu

Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/233

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de lui porter une couple au moins de bonnes crèpes aux œufs.

La vieille approuva le conseil de son fils. Elle alluma du feu, mit la poêle à crèpes dessus, prépara sa pâte et fit deux crèpes aux œufs qui avaient une apparence si appétissante, que l’eau en venait à la bouche de Bilz.

Elle les enveloppa dans un linge blanc et se dirigea ensuite vers la chapelle de saint Gily, par le chemin ordinaire. Mais, à peine fut-elle sortie, que Bilz, qui devait rester l’attendre à la maison, prit sa course à travers champs et arriva à la chapelle bien avant sa mère. Il se cacha derrière la statue du saint, dans sa niche. Quand la vieille Marc’harit arriva aussi, à son tour, elle s’agenouilla devant l’image du saint patron de son quartier, pour qui elle avait une dévotion toute particulière, et déposa une de ses crèpes à ses pieds. Elle pria quelque temps, les yeux baissés respectueusement ; puis, elle les leva d’un air suppliant sur la statue et remarqua que la crèpe avait disparu. C’était Bilz qui l’avait prise, et il en avait frotté la bouche du saint, de sorte qu’elle était toute luisante de graisse.

— C’est bien, se dit la vieille, en voyant cela, le saint a mangé la crèpe et l’a sans doute trouvée bonne ; je vais lui adresser ma demande, à présent :

— Bienheureux saint Gily, vous me connaissez bien et vous savez que nul autre, dans le pays, ne vous est plus dévot que moi, —