Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/43

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l’embarras ou le besoin, les animaux ne leur viennent-ils plus en aide, comme dans les temps anciens dont nous parlent nos vieux contes.

— Il ne faut jamais maltraiter les animaux du bon Dieu, dit le vieux Ar Floc’h, car il y en a qui sont meilleurs que bien des gens.

— Cette mansuétude universelle, reprit Francès, et cette espèce de confraternité entre l’homme et les autres créatures de Dieu remontent très-haut dans la série des âges, et peut être jusqu’au berceau même de l’humanité. Je crois aussi que c’est généralement un indice certain de l’ancienneté des récits populaires où on les rencontre. On lit dans le poëme indien le Mahabharata, un des plus anciens livres qui existent, qu’un prince hindou refusa d’entrer dans le paradis, si l’on ne permettait pas à son chien de l’y accompagner. Ailleurs, pour épargner la vie d’un pigeon et satisfaire en même temps la faim d’un épervier qui le poursuivait, un roi se fait couper dans sa propre chair l’équivalent du poids du pigeon. Au dénouement de la légende, on voit que le pigeon n’était autre que le dieu Agni, et l’épervier, le dieu Indra qui, ayant ainsi éprouvé la vertu du roi, le portent corps et âme au séjour des bienheureux.

Il n’est pas impossible que cette confraternité de l’homme et des animaux, quand on la rencontre encore de nos jours, — ce qui n’est pas rare, dans nos campagnes surtout, — provienne