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Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 1, 1865.djvu/296

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RIENZI.

ficences ; c’est sur toi que mes yeux se détournent de mon lit de parade, et si je suis destiné à mourir au pouvoir et en paix, tu peux être le dernier objet que mes yeux rencontreront ! Ou si moi-même je suis une victime… » Il s’arrêta, recula devant l’image qui se présentait à sa pensée, se tourna vers un recoin du cabinet, et tira un rideau. Ce rideau cachait un crucifix et une petite table où étaient la Bible et les emblèmes monastiques du crâne et des ossements croisés, emblèmes trop sérieux et trop irrésistibles du néant de la puissance et de l’incertitude de la vie. Devant ces conseillers muets et sacrés de la bonne et de la mauvaise fortune, cet homme fier et ambitieux se mit à genoux ; quand il se leva, son pas était plus léger et sa mine plus gaie qu’ils ne l’avaient été tout ce jour-là.


CHAPITRE III.

L’acteur démasqué.

C’est dans l’ivresse, dit le proverbe, que l’homme trahit son caractère véritable. Il y a dans la prospérité une ivresse aussi franche et aussi véridique que dans le vin. Le vernis du pouvoir fait ressortir à la fois les défauts et les beautés d’une figure humaine.

L’élévation, sans précédents, presque miraculeuse, de Rienzi, du poste d’officier du pape au gouvernement suprême de Rome, eût été accompagnée d’un miracle encore plus grand, si elle n’avait pas un peu ébloui et séduit l’objet de ses faveurs.