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Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 1, 1865.djvu/53

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RIENZI.

Il laissa doucement la personne d’Irène, maintenant évanouie de terreur, et par conséquent trop pesante sur son bras, glisser doucement à terre, puis, se tenant devant elle, et en même temps abrité par derrière par le mur qu’il avait prudemment gagné, il se contenta de parer les coups qu’on lui adressait précipitamment, et n’essaya pas de riposter. Peu de Romains, malgré leur habitude de ces combats imprévus, avaient alors l’entente sérieuse, habile, pratique du métier des armes, et les connaissances qu’Adrien avait acquises aux écoles guerrières du Nord, le favorisaient en cet instant, même dans une lutte si inégale. Il est vrai, pour tout dire, que les satellites d’Orsini ne partageaient pas la fureur de leur maître ; d’un côté, ils redoutaient les suites pour eux-mêmes, si le sang d’un seigneur de si haute naissance allait couler par leurs mains ; de l’autre, ils étaient aussi tourmentés par la crainte de se voir subitement enveloppés par les mercenaires impitoyables, postés si près pour répondre à l’appel ; aussi, ne portaient-ils que des coups désordonnés et sans but, regardant sans cesse derrière eux et sur leurs flancs, plus disposés à s’enfuir qu’à frapper. Répétant comme l’écho le cri de « Colonna » la pauvre Benedetta s’était sauvée au premier choc des épées. Elle descendit en courant la rue désolée, et, redoublant ce cri d’une voix déchirante, elle dépassa le portail même du palais d’Étienne (où quelques sombres figures étaient encore attardées) sans s’y arrêter, tant elle était frappée de crainte et de terreur.

Cependant les deux hommes armés qu’Adrien avait vus de loin remontaient tout doucement la rue. L’un avait un extérieur grossier, commun ; ses armes et sa tournure annonçaient sa condition et son origine, et le grand respect qu’il témoignait à son compagnon montrait clairement que celui-ci n’était pas un Italien, car les brigands du Nord, même en servant les vices du