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Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 1, 1865.djvu/97

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RIENZI.

de faire que, lui aussi, il était orateur, et ce n’est pas un mince plaisir pour un esprit timide. « Ils dévoraient chaque mot de l’interprétation, ils sont émus jusqu’à la moelle. Vous pourriez à l’instant même les mener au combat et trouver en eux des héros. Quant au vigoureux forgeron…

— Cecco di Vecchio ! interrompit Rienzi, ah ! son cœur est taillé dans le bronze. Qu’a-t-il fait ?

— Eh bien ! il m’a saisi par le bas de ma robe à la descente de la tribune aux harangues (oh ! que j’aurais voulu que vous pussiez me voir ! per fede, j’avais saisi un pan de votre manteau, j’étais un autre vous-même !) et m’a dit, en pleurant comme un enfant : « Ah ! seigneur, je ne suis qu’un pauvre diable, et je ne vaux pas grand’chose, mais si chaque goutte du sang qui coule dans mon corps était une vie, je les donnerais toutes pour ma patrie ! »

— Brave et digne homme ! s’écria Rienzi ému. Ah ! si Rome en avait seulement cinquante pareils ! Personne n’a fait plus de bien à notre cause, dans sa classe, que Cecco di Vecchio.

— On sent l’avantage de sa protection dans sa taille même, dit Pandolfo. C’est quelque chose que d’entendre de si grands mots tomber de la bouche d’un si grand gaillard.

— Aucune voix ne s’est élevée pour désapprouver ce tableau, ni pour en critiquer l’idée ?

— Aucune.

— Le temps de maturité approche alors ; encore quelques soleils et le fruit sera récolté. L’Aventin, le Latran et puis la trompette solitaire ! » À ces mots, Rienzi, les bras croisés, les yeux fixés à terre, sembla retombé dans ses rêveries.

« À propos, reprit Pandolfo, j’avais presque oublié de te dire que la foule aurait afflué jusqu’ici, tant elle