Aller au contenu

Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 2, 1865.djvu/119

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
115
RIENZI.

mais je t’ai dit que je pourrais te déranger encore. Voici le gentilhomme qui veut savoir ce qu’il regrettera peut-être d’avoir appris, mais ce n’est pas mon affaire. Est-ce qu’une dame, jeune et belle, avec une chevelure noire et une taille mince, n’est pas entrée dans cette maison, il y a trois jours, frappée des premiers symptômes de la peste ?

— Oui, tu le sais aussi bien que moi ; et tu sais encore mieux qu’il y a deux jours qu’elle est partie pour l’autre monde ; elle n’en a pas eu pour longtemps. Je n’ai jamais vu de mort plus empressée.

— Ne portait-elle rien de remarquable ?

— Comme si tu l’ignorais, ennuyeux questionneur ! Un manteau bleu avec des étoiles d’argent.

— As-tu pu deviner quelque chose de sa vie passée ?

— Non, si ce n’est qu’elle parlait à tout propos dans son délire de la maison de Santa Maria dei Pazzi, et de bravos, et de sacrilége.

— Êtes-vous satisfait, seigneur ? demanda le fossoyeur à Adrien, en se tournant vers lui d’un air triomphant. Mais non, je vais vous donner encore un gage plus certain si vous avez du courage. Voulez-vous me suivre ?

— Je te comprends, conduis-moi. Du courage ! qu’ai-je maintenant à craindre sur terre ?

— L’autre murmurait entre ses dents : oui, laissez-moi faire ; j’ai une bonne tête, allez ! Je ne demande pas à un gentilhomme de me croire sur ma parole ; je veux le faire juge par ses propres yeux de ce que vaut la peine que je me suis donnée, » et le fossoyeur le conduisit alors, par une des portes extérieures de la ville. Là, sous un hangar, étaient assis six de ses hideux confrères, avec des bêches et des pioches à leurs pieds.

Le Becchino se retourna vers Adrien dont les traits annonçaient la résolution du désespoir.

« Beau seigneur, dit-il, avec l’accent de la pitié, comme