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RIENZI.

Les Romains restèrent sur la place, et peu de temps après, le démagogue Baroncelli, voyant là une chance de succès s’offrir à son ambition, se mit à les haranguer. Quoique ce ne fût pas un homme éloquent, ni un orateur habile, il avait l’art de faire valoir les lieux communs les plus populaires. Il savait surtout que le côté faible de son auditoire était la vanité, l’indolence et une arrogante fierté.

« Regardez bien, mes maîtres, dit-il en s’élançant sur les degrés de la place du Lion ; le tribun parle bravement comme toujours, mais c’est toujours aussi l’histoire du singe qui emploie le chat à tirer ses marrons ; il voudrait bien vous faire fourrer vos griffes dans le feu, mais vous ne serez pas assez sots pour l’écouter, Dieu merci ! Le tribun, ce brave homme, se pavane dans un palais ; il y donne des festins et se baigne dans un vase de porphyre (honte à lui !), dans un vase où saint Sylvestre a baptisé l’empereur Constantin ; tout cela vaut bien la peine que l’on combatte pour l’avoir ; mais vous, mes maîtres, qu’y gagnez-vous si ce n’est de rudes coups et le plaisir de regarder un spectacle, un jour de fête ? Que dis-je ? Si vous battez ces bandits, vous aurez un autre impôt sur le vin ; ce sera là toute votre récompense !

— Écoutez ! s’écria Cecco ; voilà la trompette qui sonne : quel dommage qu’il ait voulu nous taxer !

— C’est vrai, cria Baroncelli ; voici la trompette qui sonne, une trompette d’argent, par le seigneur ! La semaine prochaine, si vous l’aidez à se tirer de là, il en aura une d’or. Mais allez donc. Pourquoi restez-vous là, mes amis ? Ce n’est que cent cinquante mercenaires. À dire vrai, ce sont des diables à quatre, dans le combat, revêtus d’armure de fer des pieds à la tête ; mais qu’est-ce que cela fait ? S’ils coupent la gorge à quatre ou cinq cents pauvres diables, vous n’en finirez pas moins par les battre, et le tribun n’en sera que plus gai à son souper.

— Voici le second appel qui résonne, dit le boucher.