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avec le lion et la légendaire petitesse appartiennent réellement au père et non au fils de Charles Martel, c'est qu'il y a des traces incontestables de récits épiques formés autour du fils d'Anseïs. Déjà du temps de Cliarlemagne Paul Diacre écrivait : « Ans- chises ' genuit Pippinum, quo nihil umquam potuit esse auda- cius-. » A la fin du x siècle, les Annales Metteuses, texte consacré à la gloire de la maison carolingienne et dont l'histo- rien doit se méfier, disent en parlant du père de Charles Martel : « Cujus memorabilium gestorum commenta, quae ante princi- patum seu in principatu peregit, cunctis Francorum populis declarata coruscant'. » Et l'auteur raconte, comme le premier des hauts fiiits de Pépin, une histoire qui nous représente, dit M. Rajna, une vraie « chanson d'enfances », comme nous en connaissons plus d'une. Gondouin avait tué, en trahison, Anseïs ; le jeune Pépin, élevé en lieu sûr, fait tout à coup irruption dans le palais usurpé par le traître, et « puerili quidem manu, sed heroica ferocitate prostravit, haud aliter quam ut de David legitur quod Domino gubernante immanem Goliam puerili ictu prosternens, proprio gladio vita capiteque spoliavit . ' » La

��1. Cette fornie bizarre, plus tard ramenée simplement à Aiichises, est don- née au nom Ansegisus pour le rapprocher de celui du père d'Enée et rappeler la descendance troyenne des Francs. L'épopée, naturellement, ignore ces fables érudites.

2. Voy. P. Rajna, Le Origiiii di'lT epopea J'raiicesc, p. 245. C'est littérale- ment ce que dit Adenet du roi Pépin : Mais plus J:ardic chose nefu oiiques choi- sie. L'anecdote rapportée ci-dessus (p. 189, n. i) au roi pourrait donc bien aussi être originairement la propriété de son grand-père.

3. Pertz, 55., I, 516.

4. Sigebertde Gembloux, au commencement du .\if siècle, nous apprend que Gondouin était un enfont trouvé, élevé et fait chevalier par Anseïs, qu'il avait ainsi récompensé de ses bienfaits (Pertz, SS., VI, 327). J'ai vu quelque part, mais je ne puis me rappeler oij, que Gondouin tua Anseïs à une partie de chasse. C'est ainsi que le traître Doon tue le père de Bovon dans Bovon de Hanslone, et Pépin venge ensuite son père comme Bovon venge le sien. On peut encore rappeler, comme exemple de la vengeance tirée par un fils du meurt-e de son père (sans parler de Datirel et Béton, imité de Boimide Hans- lone) [cf. ci-dessus, pp. 144-5], l'histoire de Jourdain de Blaie. Il est impossible de savoir si les récits des Annales Mellenses et de Sigebert ont une base historique ou remontent uniquement à une ancienne fiction épique.

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