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Page:Mélanges de littérature française du moyen âge.djvu/254

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250 • LE ROMAN

rons, suivait la mode de son temps. Il cite Tristan (voir plus loin) et Apoloim, c'est-à-dire une traduction française (perdue) du célèbre roman <i' Apollonius de Tyr\^\

On regarde généralement le Mors de l'espanle, rappelé dans le même passage de Cligês, comme une œuvre analogue, racon- tant l'histoire de Pélops, dont Cérès, on le sait, mangea l'épaule par mégarde. Ce ne serait pas en tout cas un Ovidianiini, puis- que Ovide ne fait à cette histoire qu'une allusion passagère. Il faudrait que le poète eût trouvé l'histoire dans une glose ou fût allé la chercher dans Hygin. Mais cette histoire étrange et, en somme, tout épisodique se prêtait-elle à une traduction ? N'au- rait-elle pas été dénuée de tout intérêt pour des lecteurs fran- çais ? Le titre de Mors de Tespaule conviendrait d'ailleurs assez mal : Cérès ne se contenta pas de mordre dans l'épaule de Pélops, elle la dévora entièrement. Pour toutes ces raisons, je doute que le Mors de Fespaule fût une traduction de l'histoire de Pélops; et je me demande si ce n'était pas un conte d'une tout autre provenance ^

La traduction de VArs atiiatoria, que mentionne encore le début de Cligês, est malheureusement perdue, et nous ne savons pas si par les Coniandcnicti:^ Ovide il faut entendre sim- plement un développement du titre de ce même ouvrage ou une traduction des Retnedia ainorisK

Ce sont les seules traductions dues à Chrétien, — si le Mors de Vespaule en est une, — qui nous soient connues. Ses autres ouvrages appartiennent tous au genre des romans mondains, et sont empruntés, — sauf Cligês, qui ne s'y rattache que par un

��1. [Voy. Zeitschr. f. rom. Phil., XXXIII, 226.]

2. J'ai déjà exprimé ces doutes dans VHist. litt. de h France, t. XXIX, p. 489. Ce trait de l'épaule mordue fait songer à des contes celtiques, par exemple celui de Caradoc, dont la femme eut le bout du sein enlevé par la morsure d'un serpent. [Cf. G. Paris, Caradoc et te serpent, Romania, XXVIII, pp. 214 sqq.]

3. Les vers d'un lai de Marie de France {Giiigeniar, 219-244) où il s'agit d'une peinture montrant Vénus qui brûle le livre Ovide ou it enseigne Cornent chascuns s'amur estraigne et excommunie ceux qui le liront s'appliquent certai- nement aux Remédia ; mais il n'est pas sûr qu'il s'agisse d'une traduction en langue vulgaire.

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