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Page:Mélanges de littérature française du moyen âge.djvu/36

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32 LITTÉRATURE FRANÇAISE AU MOYEN AGE

ancienne d'environ vingt-cinq ans. — En parlant du petit vers féminin qui, dans un certain nombre de chansons de geste, suit les laisses de décasyllabes ou d'alexandrins, l'auteur l'appelle, en français, « vers orphelin » ; cela ferait croire que cette expres- sion appartient à l'ancien français, tandis qu'elle n'est que tra- duite de l'expression allemande {der IFaise), et ne se trouve, au moyen âge, ni en français ni en provençal.

Geste de Doon. — Sur Adenet le Roi, l'auteur remarque (p. 42) : « Il aura connu en Brabant la version flamande des Nibehngen. Il dit que Guillaume et Oger jouèrent de terribles chansons avec des archets d'acier et des écus cornme violons. Cette comparaison vient des Nibelungen et est toute naturelle à propos de Volker, le Spiehnann, mais non à propos d'Oger et de Guillaume, dont le talent musical n'est nulle part mentionné. » Cela est très ingénieux, mais à mon avis peu solide. Quand Adenet dit en parlant de ces deux héros :

Il vicièrent tôt doi d'une chançon Dont les vieles erent large ou blazon Et brant d'acier estoient li arçon,

il ne fait qu'employer une métaphore qui pouvait fort bien se présenter d'elle-même à l'esprit d'un poète: on en trouve une toute semblable par exemple dans Cligès (v. 4070-71):

As espees notent un lai

Sor les hiaumes qui retentissent.

A propos à'Oger et de Renaud de Montatdmn, M. Suchier écrit (p. 43) : « Nous laisserons les savants français dans leur conviction que les brutalités répondent à l'élément germanique, les traits nobles à l'élément gaulois des chansons de geste. » Quels sont donc « les savants français » qui ont revendiqué les traits nobles des chansons de geste pour l'élément « gaulois » (Gûllisch) ? On a pu dire, — et le court tableau que trace M. Suchier lui-même (p. 6) des mœurs mérovingiennes ne le dément pas, — que l'épopée française contient un fond bar- bare qui revient à l'élément germanique de la société où elle s'est formée, et qu'elle s'est peu à peu adoucie à mesure que la civilisation faisait des progrès. On peut croire avec M. Suchier que c'est le x' siècle, « époque de décadence morale », qui « a

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