Page:Mémoire historique sur la communauté St.-Antoine, etc., 1850.pdf/433

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amour pour la retraite. Il ne sortoit que quand il avoit du bien à faire, ou que le devoir l’y contraignoit ; il n’aimoit pas le monde et s’y trouvoit déplacé ; il savoit qu’on ne s’y montre jamais, sans perdre quelque chose de l’attachement à ses devoirs. Oui, le monde sera toujours l’écueil des personnes consacrées à Dieu, ou vouées à la piété. La retraite est leur élément dont elles ne peuvent sortir sans danger. Aussi, M. Renaud, semblable au pieux auteur de l’imitation, se sentoit soulagé d’un grand poids, quand il rentroit dans sa chère cellule ; où il pouvoit respirer à son aise, loin du fracas de la ville, et de la corruption du monde.

Nul ne fut plus humble que lui : plus son mérite étoit reconnu, plus il prenoit occasion de s’humilier devant Dieu, et à mesure qu’on louoit ses qualités précieuses, il se reprochoit à lui-même ses imperfections et ses fautes. La confiance que lui témoignoient ses confrères étoit sans bornes ; ils ne faisoient rien sans le consulter ; ils agissoient avec plus d’assurance, quand ils avoient obtenu qu’il approuvât leur conduite. Leurs écrits étoient soumis à sa révision, il pouvoit ajouter ou retrancher à son gré : tant on étoit persuadé qu’il n’abuseroit pas du droit qu’on lui laissoit, et que ce qu’il auroit corrigé acquerroit un degré d’exactitude plus propre à produire son effet. Ses confrères n’étoient pas les seuls qui rendissent justice à son jugement et à sa capacité. Combien de fois fut-il pris pour arbitre par des gens du dehors qui estimoient sa droiture ? Les administrateurs eux-mêmes ; voulant profiter de ses lumières et de son expérience, le firent entrer dans les assemblées du conseil qui se tenoient, au moins tous les mois.

Silencieux par goût et par principe, il parloit peu ; il fuyoit Les conversations oiseuses ; il n’avoit d’attrait, que pour les entretiens qui rouloient sur la Religion et avoient pour objet la gloire de Dieu et le bien du prochain. Dans ces entretiens même, il évitoit avec soin de passer pour savant ; il ne se faisoit pas remarquer, par un empressement déplacé. Sous prétexte de piété, il étoit bien éloigné de se permettre, à l’égard de qui que se soit, le moindre propos désavantageux ; il savoit que