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Page:Mémoires de Cora Pearl, Ed. Levy, 1886.djvu/281

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registre. Il avait en outre la manie d’aller à pied.

Un maître de langue russe, je crois, l’homme le plus distrait de la terre, qui savait quinze idiomes différents, allait au château de Menon, l’hiver, trois fois par semaine, donner des leçons au maître de céans et s’en retournait le soir, à la gare, armé d’une lanterne. Le vicomte l’accompagnait souvent jusqu’à la station. Comprend-on un homme archimillionnaire qui prend plaisir à guider dans l’obscurité un professeur de russe ? Gontran marchait devant Burchère (c’était le nom du quidam), dans un chemin bordé de fossés. À chaque dix pas, on entendait des gémissements plaintifs.

— Où êtes-vous, Burchère ?

— Dans le le fossé, monsieur le vicomte.

— À droite, maître ?

— Non, à gauche.

Le vicomte procédait au sauvetage.

Burchère, ses livres d’une main, sa lanterne de l’autre, s’élançait dans l’espace, étendant les bras. Il nourrissait l’espoir de rattraper