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Page:Mémoires de Cora Pearl, Ed. Levy, 1886.djvu/33

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MÉMOIRES

une passion bien vive, mais il me consolait, par la délicate franchise de ses procédés, par la sincère expansion de sa jeunesse, des privautés odieuses que s’était arrogées le vieux satyre. Joli homme, doué d’une voix très sympathique, d’une physionomie avenante, par moment jaloux à faire rire, il possédait les qualités et les défauts qui ne laissent pas de plaire dans un véritable gentleman. Il avait vingt-cinq ans, j’en avais quinze ; il m’aimait éperdument, et ne me déplaisait pas trop, en somme.

Nous nous livrions tous deux à de longues promenades, évitant avec soin les rues fréquentées, et gagnant, le plus souvent dans un cab, les portes de la ville. Une fois dans la campagne, nous nous mettions à courir, à jouer. C’était au mois d’octobre : j’emplissais mes poches de marrons pour faire des colliers. Puis, nous avisions quelque auberge où nous prenions notre repas, au grand air. Il me jurait qu’il n’avait jamais aimé que moi, quoiqu’il eût déjà, — il l’avouait, le monstre ! courtisé pas mal de jeunes filles. Moi, je lui