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Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/21

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murait si doux, et les montagnes bleues de Bourmont.

Lorsque je vis Sydney environné de sommets bleuâtres, j’y ai reconnu (avec un agrandissement) les crêtes de montagnes que domine le Cona.

À l’ouest, les côtes et le bois de Suzerin, d’où les loups, au temps des grandes neiges, entrant par les brèches du mur, venaient hurler dans la cour.

Les chiens leur répondaient, furieux, et ce concert durait jusqu’au matin : il allait bien à la ruine et j’aimais ces nuits-là.

Je les aimais surtout, quand la bise soufflait fort, et que nous lisions bien tard, la famille réunie dans la grande salle, la mise en scène de l’hiver et des hautes chambres froides. Le linceul blanc de la neige, les chœurs du vent, des loups, des chiens, eussent suffi pour me rendre un peu poète, lors même que nous ne l’eussions pas tous été dès le berceau ; c’était un héritage qui a sa légende.

Il faisait un froid glacial dans ces salles énormes ; nous nous groupions près du feu : mon grand-père dans son fauteuil, entre son lit et un tas de fusils de tous les âges ; il était vêtu d’une grande houppelande de flanelle blanche, chaussé de