Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/246

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dans ma cellule, à Clermont ; j’avais un tas de laines à tapisserie envoyées par ma pauvre mère et mes amis ; je n’eus pas de cesse que les trous ne fussent bouchés.

Mais pendant la nuit, un pauvre petit cri se fit entendre derrière ce trou, cri si plaintif, qu’il eût fallu un cœur de pierre pour ne pas lui ouvrir ; c’est ce que je fis de suite, la bête sortit devant moi.

La souris fut-elle une imprudente ou une bête de génie qui savait juger son monde ? Je n’en sais rien ; mais, à partir de cet instant, elle vint effrontément jusque dans mon lit, où elle montait des bouchées de pain pour les gruger à l’aise, se moquant parfaitement des mouvements que je faisais pour la faire partir, et se servant comme garde-manger, et même comme pire encore, du dessous de mon oreiller.

Elle n’était pas dans la cellule à mon départ, je ne pus la mettre dans ma poche, j’ignore ce que la pauvre petite est devenue. J’avoue qu’en partant je l’ai recommandée à la pitié de tous.

En remontant jusqu’au berceau ou jusqu’à certaines circonstances qui ont frappé l’organisme cérébral, on trouve la source vive des fleuves qui emportent la vie, le point de départ des comparaisons successives.